Rassurez-vous, lorsque je parle de point chaud à l’ile de la Réunion, il n’est pas question d’une situation politique explosive ou qu’il y fait froid.
Cette ile est le siège du piton de la Fournaise, un volcan dit de point chaud. Ce type de volcanisme est particulier puisqu’il agit comme une sorte de chalumeau à partir du manteau terrestre. Il a transpercé la croûte terrestre et déverse sa lave en effusions lentes, mais relativement régulières.
Ce volcan est du même type que le fameux Kilauea à Hawaï et l’un des plus actifs de la planète. Il aurait formé les trapps du Deccan que je décrivais dans un récent article. On le croyait âgé d’environ 66 millions d’années justement à cause de la formation des trapps indiens. En fait, il serait beaucoup plus vieux. De récentes études suggèrent que sa formation remonte aux premiers âges de la Terre, à l’Hadéen, éon commençant aux origines de notre planète voilà 4,6 milliards d’années.
Ce panache de magma primitif ne se serait jamais mélangé au reste du manteau terrestre et perdurerait depuis tout ce temps, faisant de la lave s’écoulant en surface un témoin extraordinaire de la matière originelle de notre bonne vieille Terre.
Aussi impressionnantes que soient les images de l’éruption du volcan Kīlauea à Hawaï, ce type de volcanisme est très gentil en comparaison avec l’autre type beaucoup plus violent.
Effusions de lave du Kilauea
Il existe plusieurs façons de catégoriser les volcans, l’une est par sa «couleur». Le Kilauea est un volcan rouge ou effusif. C’est-à-dire que de la lave s’en écoule en jaillissant d’un ou de plusieurs cratères pour dévaler le cône et envahir les environs. Plus la lave est pauvre en silice, plus elle est liquide et plus elle s’écoule vite. Pourtant, ce volcanisme est très peu dangereux. Oui, il incendie des villas construites beaucoup trop près, détruit des routes, brûle des champs et des boisés, mais il ne fait que très peu de victimes. Ses coulées et ses effusions sont spectaculaires, mais les dégâts restent habituellement bien en deçà de ce que peut causer un incendie de forêt moyen.
Cratère du Kīlauea – Hier
Le Kilauea est un volcan rouge tout comme le mont Erebus en Antarctique, le piton de la Fournaise à l’ile de la Réunion, le Nyiragongo en République démocratique du Congo, L’Etna en Italie. Ils sont presque tous en éruption, dont certains en permanence. Pourtant ils ne font que très peu de victimes chaque année et bien souvent, les vies fauchées sont des gens qui ont manqué à la plus primaire des prudences.
Plus la lave est siliceuse, plus elle s’écoule lentement. On serait tenté de croire que de la lave lente est moins dangereuse, pourtant, c’est le contraire. Lorsque la lave est trop lente pour s’écouler, elle forme des bouchons dans les puits qui remontent le magma vers la surface et empêchent les gaz contenus dans cette roche liquide d’être évacués. Lorsque le magma remonte vers la surface, la pression le comprimant s’amoindrit. Cette diminution de pression sur le liquide brûlant a pour effet de dégazer le magma. Le gaz libéré est principalement et de la vapeur d’eau, du dioxyde de carbone et du dioxyde de soufre. Si un bouchon de lave durcie bloque ces gaz en sous-sol, la pression interne va grimper jusqu’à ce que le bouchon de la marmite saute.
Mont Pinatubo – Philippines 1991
On se retrouve alors avec un volcanisme gris parce qu’il n’engendre que très peu de lave, mais beaucoup de cendres, de pierres ponces et de nuées ardentes. Les volcans gris sont extrêmement dangereux, car ils explosent, détruisant tout sur des dizaines de kilomètres à la ronde. Les nuées ardentes sont des gaz et des poussières à très haute température, plusieurs centaines de degrés Celsius, qui dévalent les flancs des volcans à des centaines de kilomètres à l’heure, prenant n’importe qui par surprise. Ils brûlent les gens autant de l’intérieur lorsque les gaz sont inhalés que de l’extérieur. Les panaches de poussières que ces volcans éjectent peuvent atteindre des hauteurs de plus de 35 kilomètres d’altitude. Ces particules en suspension font parfois plusieurs fois le tour de la Terre et selon la quantité émise, elles peuvent modifier le climat global sur plus d’une année.
Mont Agung – Bali
L’éruption du Vésuve en 79 de notre ère était une éruption plinienne caractérisée par un volcanisme gris. Le Krakatoa a explosé en 1883, c’était un volcan gris. Le mont Saint Helens est un volcan gris (1980). Le Pinatubo ayant explosé en 1991 est un volcan gris. Il a déréglé le climat de la planète entière. Le mont Thera (Stromboli) qui a balayé tout un peuple, les Minoeens, dans l’antiquité est un volcan gris. Il est en partie responsable du mythe de l’Atlantide. Le mont Agung à Bali est un volcan gris. Le Popocatepetl au Mexique est un volcan gris. Tous ces volcans ont été ou sont encore très dangereux.
Le Kīlauea n’explosera pas et son principal danger provient surtout de ses émissions de dioxyde de soufre. Sur l’ile d’Hawaï, tout près de lui vit son grand frère, le Mauna Loa, un autre volcan rouge toujours actif, mais d’une dimension de plusieurs dizaines de fois plus importantes que celles du Kīlauea.
Voici une vidéo en anglais sur l’étude du Kīlauea.