L’Antarctique, deux menaces

L’Antarctique est le septième continent. Il suscite beaucoup d’intérêt depuis quelques années. Il comporte un volcan actif, le mont Erebus. Sa couche de glace varie beaucoup d’un endroit à l’autre, certains lieux laissent apparaitre le sol rocailleux tandis qu’à d’autres, trois kilomètres d’eau gelée depuis des millions d’années recouvrent son sol en permanence.

Ce continent n’a pas toujours occupé sa position actuelle. La dérive des continents l’a amené à ce lieu très particulier du globe à partir du fractionnement du supercontinent la Pangée entamé il y a de cela 240 millions d’années.

Ce n’est plus un secret pour personne, le réchauffement climatique fait fondre des quantités phénoménales de sa glace qui a pour effet direct d’élever le niveau des océans. On compte encore ce rehaussement en millimètre, mais il s’accélère dangereusement. Il deviendra bientôt impossible de protéger efficacement plusieurs lieux densément peuplés de la planète contre les effets de cette élévation permanente. 

Les conséquences les plus évidentes surviennent lors d’ouragans, typhons, cyclones — ces trois mots désignent le même phénomène météorologique — lorsque la pression atmosphérique en forte baisse surélève le niveau des mers qui envahissent alors les terres côtières ayant le malheur de se trouver à basse altitude. Ces inondations occasionnelles deviennent aujourd’hui plus fréquentes, et ce, une fois encore, à cause du surchauffage de l’atmosphère et des océans qui dope les tempêtes tropicales.

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Ce problème ponctuel deviendra permanent lorsque l’élévation moyenne des océans finira par avoir le dessus sur plusieurs basses terres. Certaines villes mieux nanties pourront retarder l’inévitable en construisant des murs de rétention et en installant des pompes géantes, mais à plus long terme, elles seront elles aussi condamnées à disparaitre.

Les changements climatiques ne toucheront pas seulement les riverains. Nous subirons tous d’une façon ou d’une autre les multiples conséquences directes et indirectes de nos émissions des gaz à effet de serre.

Et parmi les conséquences indirectes de la concentration de méthane et de CO2 dans l’atmosphère, l’une d’elles concerne une fois de plus l’Antarctique.

Le septième continent cache bien des choses sous sa glace, dont tout un tas de volcans. On n’a pas fini de les compter et jusqu’à présent, on en a recensé 138. Pour l’instant, ils semblent endormis, mais un problème se profile à l’horizon et celui-ci émane une fois de plus du réchauffement de notre planète.

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Une analogie très valable consiste à voir un volcan comme une bouteille de champagne. Son magma accumule des gaz dissouts provenant de l’eau qui s’est infiltrée. Tant que le bouchon sur la bouteille parvient à retenir la pression interne, rien ne survient, tout reste calme. Toutefois, on connait la suite des choses si, pour une raison ou pour une autre, l’équilibre se rompt. Cette rupture peut provenir d’une hausse subite de la pression interne, comme lorsqu’on brasse la bouteille, ou de l’affaiblissement du bouchon.

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Pour l’Antarctique, le bouchon, c’est sa glace. En fondant, il s’affaiblit et un jour, la pression interne des volcans actuellement enfouis dépassera la capacité de la glace de la contenir. Lorsque le réveil sonnera, combien de volcans entreront en éruption simultanément ?

Ce mystère ne sera connu que le jour où la catastrophe surviendra. Il est impossible de la prédire, mais cette incapacité ne signifie aucunement qu’elle n’arrivera pas. Toutes nos connaissances actuelles pointent dans la direction d’un effet « bouteille de champagne ».

Ainsi, le seul continent inhabité (ou presque) nous menacera avec sa glace et ensuite avec son feu. Nous sommes en train de réveiller le dragon endormi dans sa prison en lui retirant l’immense couverture glacée permettant de le maintenir placide. Ce n’est vraiment pas une bonne idée ! Mais à quoi sert la prudence, sinon à nous empêcher de rester confortablement endormis sous une chaude couverture d’insouciance ?

En volcanisme, il y a danger et danger

Aussi impressionnantes que soient les images de l’éruption du volcan Kīlauea à Hawaï, ce type de volcanisme est très gentil en comparaison avec l’autre type beaucoup plus violent.

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Effusions de lave du Kilauea

Il existe plusieurs façons de catégoriser les volcans, l’une est par sa «couleur». Le Kilauea est un volcan rouge ou effusif. C’est-à-dire que de la lave s’en écoule en jaillissant d’un ou de plusieurs cratères pour dévaler le cône et envahir les environs. Plus la lave est pauvre en silice, plus elle est liquide et plus elle s’écoule vite. Pourtant, ce volcanisme est très peu dangereux. Oui, il incendie des villas construites beaucoup trop près, détruit des routes, brûle des champs et des boisés, mais il ne fait que très peu de victimes. Ses coulées et ses effusions sont spectaculaires, mais les dégâts restent habituellement bien en deçà de ce que peut causer un incendie de forêt moyen.

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Cratère du Kīlauea – Hier

Le Kilauea est un volcan rouge tout comme le mont Erebus en Antarctique, le piton de la Fournaise à l’ile de la Réunion, le Nyiragongo en République démocratique du Congo, L’Etna en Italie. Ils sont presque tous en éruption, dont certains en permanence. Pourtant ils ne font que très peu de victimes chaque année et bien souvent, les vies fauchées sont des gens qui ont manqué à la plus primaire des prudences.

Plus la lave est siliceuse, plus elle s’écoule lentement. On serait tenté de croire que de la lave lente est moins dangereuse, pourtant, c’est le contraire. Lorsque la lave est trop lente pour s’écouler, elle forme des bouchons dans les puits qui remontent le magma vers la surface et empêchent les gaz contenus dans cette roche liquide d’être évacués. Lorsque le magma remonte vers la surface, la pression le comprimant s’amoindrit. Cette diminution de pression sur le liquide brûlant a pour effet de dégazer le magma. Le gaz libéré est principalement et de la vapeur d’eau, du dioxyde de carbone et du dioxyde de soufre. Si un bouchon de lave durcie bloque ces gaz en sous-sol, la pression interne va grimper jusqu’à ce que le bouchon de la marmite saute.

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Mont Pinatubo – Philippines 1991

On se retrouve alors avec un volcanisme gris parce qu’il n’engendre que très peu de lave, mais beaucoup de cendres, de pierres ponces et de nuées ardentes. Les volcans gris sont extrêmement dangereux, car ils explosent, détruisant tout sur des dizaines de kilomètres à la ronde. Les nuées ardentes sont des gaz et des poussières à très haute température, plusieurs centaines de degrés Celsius, qui dévalent les flancs des volcans à des centaines de kilomètres à l’heure, prenant n’importe qui par surprise. Ils brûlent les gens autant de l’intérieur lorsque les gaz sont inhalés que de l’extérieur. Les panaches de poussières que ces volcans éjectent peuvent atteindre des hauteurs de plus de 35 kilomètres d’altitude. Ces particules en suspension font parfois plusieurs fois le tour de la Terre et selon la quantité émise, elles peuvent modifier le climat global sur plus d’une année.

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Mont Agung – Bali

L’éruption du Vésuve en 79 de notre ère était une éruption plinienne caractérisée par un volcanisme gris. Le Krakatoa a explosé en 1883, c’était un volcan gris. Le mont Saint Helens est un volcan gris (1980). Le Pinatubo ayant explosé en 1991 est un volcan gris. Il a déréglé le climat de la planète entière. Le mont Thera (Stromboli) qui a balayé tout un peuple, les Minoeens, dans l’antiquité est un volcan gris. Il est en partie responsable du mythe de l’Atlantide. Le mont Agung à Bali est un volcan gris. Le Popocatepetl au Mexique est un volcan gris. Tous ces volcans ont été ou sont encore très dangereux.

Le Kīlauea n’explosera pas et son principal danger provient surtout de ses émissions de dioxyde de soufre. Sur l’ile d’Hawaï, tout près de lui vit son grand frère, le Mauna Loa, un autre volcan rouge toujours actif, mais d’une dimension de plusieurs dizaines de fois plus importantes que celles du Kīlauea.

Voici une vidéo en anglais sur l’étude du Kīlauea.

Les feux de l’Antarctique

Aujourd’hui, un article sur les volcans de l’Antarctique. J’utilise le pluriel malgré le fait qu’un seul, le mont Erebus, soit présentement en activité.

Le septième continent suscite beaucoup d’intérêt depuis quelques années, et ce à plus d’un titre. Sa couche de glace varie beaucoup d’un endroit à l’autre, elle peut même atteindre 3 kilomètres à certains endroits. Les outils satellitaires modernes permettent maintenant de fouiller loin sous cette glace jusque dans son sous-sol. Ce continent isolé cache bien des choses, dont toute une kyrielle de volcans. On n’a pas fini de les compter et jusqu’ici, on en a trouvé 138. Pour l’instant, ils semblent endormis, mais un problème se profile à l’horizon.

Lorsqu’ils seront débarrassés de la glace qui les recouvre, ils pourraient bien se remettre en activité puisque ce terrible constat fut observé dernièrement en Islande. Qu’on le veuille ou non, le réchauffement de la Planète risque de nous surprendre de plus d’une façon.

Ainsi, rejeter beaucoup plus de cendres dans l’atmosphère engendrerait un refroidissement des températures constaté lors de l’éruption du mont Pinatubo en 1991 aux Philippines. Cette tendance à la baisse des températures pourrait-elle équilibrer le réchauffement causé par l’émanation des gaz de matières fossiles ?

Prenons un exemple comparable. Deux équipes s’affrontent au jeu de souquer le câble. Lorsque les deux groupes alignent des forces semblables, le centre du câble oscille légèrement autour du point de départ. Mais au final, celui-ci se déplace inexorablement dans un sens ou dans l’autre, car la traction résultante ne pourra jamais rester toujours en parfait équilibre. La conséquence, on la connait. L’équipe A ou l’équipe B gagnera. Il ne peut en être autrement, sauf en ce qui touche la troisième possibilité, celle où le câble se rompt. On ne parvient jamais à faire disparaitre une tragédie en causant une calamité de tendance inverse. L’équilibre est trop fragile et nous n’avons aucun contrôle des quantités de poussières rejetées dans l’atmosphère par les volcans. Nous avions toutefois celui des rejets de nature anthropique, mais nous l’avons totalement délaissé. En poursuivant notre analogie du duel à la souquée, c’est comme laisser une équipe rajouter n’importe quel nombre de joueurs sans rien contrôler, alors que de l’autre, on connait grossièrement le nombre de joueurs graduellement rajouté, mais là encore, le contrôle nous échappe de plus en plus. Inexorablement, la résultante fera une équipe gagnante, mais dans tous les cas, nous, créatures de la Terre, serons perdantes.

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p class= »p1″>Photo: Wikipédia