La vérité est-elle bonne pour tous ?

Dans mon précédent article traitant de la fatigue, je concluais sur le principe que la vérité m’a aidé à tracer mon chemin parmi mes difficultés et que me la cacher n’aurait pu que me perdre et retarder mon processus de guérison. Mais est-ce le cas pour tout le monde ?

Sombre piège

À mon avis, la vérité est bonne pour tous. On est porté à cacher la vérité auprès d’une personne qu’on considère comme étant une sorte d’enfant, vulnérable, une personne à protéger, quitte à lui mentir, un moindre mal, pense-t-on. Mais que se cache-t-il sous cette belle excuse ?

Malheureusement, mentir, même à un enfant, n’est pas la solution. C’est une marque de faiblesse de l’adulte qui préfère mentir, une solution simple, plutôt que de trouver une façon élégante et adéquate de lui dire la vérité.

Élever un enfant dans le mensonge fera inévitablement de lui un menteur. Alors, la prochaine fois que vous hésiterez en pensant protéger votre progéniture en lui cachant la vérité, sachez que vous lui donnez le parfait exemple de ce que vous ne voulez pas qu’il devienne plus tard.

Oui, la vérité est bonne pour tous, seules les façons de la dire ne sont pas toujours adéquates. Évitez la facilité, creusez-vous les méninges et osez dire la vérité de la meilleure manière que vous pouvez imaginer. Un enfant saura vous pardonner une déclaration maladroite mais véridique, jamais il ne vous pardonnera de lui avoir menti dans le but factice de le protéger alors que la fainéantise ou la couardise en sont la véritable raison. Et que vous le vouliez ou non, votre leurre ne durera qu’un court laps de temps, car il sait d’emblée discerner la différence.

Même les plus pieux mensonges n’achètent pas de la protection, par contre, uniquement et à coup sûr, de la déception.

Dirac

L’un des plus grands génies du XXe siècle fut sans contredit le Britannique Paul Dirac. C’est lui qui est à l’origine de la conception de l’antimatière. J’utilise à escient le terme « conception » et non pas celui de « découverte ». Évidemment, il n’a pas créé ces antiparticules, mais il a imaginé leur existence en résolvant une équation qui engendrait deux solutions. L’une décrivait une énergie naturellement positive, mais l’autre était négative. Une énergie peut être de pression positive ou négative, mais l’énergie, elle, est toujours positive, du moins avant Dirac.

Selon la célèbre équation d’Einstein E = mc2, si une énergie possède un signe négatif, la masse de l’autre côté de l’équation doit également posséder le même signe. Mais que signifierait une masse négative ? Dirac supposa alors que la nature devait posséder de l’antimatière.

Deux ans plus tard, on découvrit l’une de ces fameuses antiparticules, preuve de la justesse de son équation et de ses déductions.

Dirac était un génie comme ceux que l’on ne comprend pas durant les jours normaux, un génie habitant son monde intérieur, sa propre réalité. Aujourd’hui on appelle autistes ces gens d’exception ou tout autre nom désignant des gens inhabituels, étranges et souvent idiots à nos yeux.

Il nous faut de ces personnes différentes, qui pensent autrement, qui voient le monde différemment qui sont en mesure de résister aux dogmes, de les repousser et même de les haïr.

Il nous faut les protéger, les encourager, les intégrer dans nos processus opérationnels et décisionnels. Nous avons besoin des gens comme Dirac qui nous poussent, nous obligent à regarder différemment autour de nous, à voir ce qui nous paraissait invisible et pourtant qui nous pendait sous le nez depuis toujours.

Vous connaissez probablement un Dirac. Qu’êtes-vous prêt à faire pour lui ? Notre survie en dépend peut-être.