Expression québécoise — 7

Ça faisait longtemps que je ne vous avais pas confronté à un mot ou à une expression typiquement québécoise.

Pour cette septième particularité de la langue de chez nous (en vérité, ça en fait 8 à cause de la 1,5), voici le mot d’aujourd’hui: «tapocher».

Étymologiquement, il provient du mot «taper» et probablement de «taloche» puisque le verbe «talocher» existe (donner une taloche), mais son sens diffère du verbe «talocher».

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Je vous avise que les sens donnés au mot dans cet article proviennent de moi en tant qu’utilisateur. Je ne suis pas linguiste et je ne prétends pas que mes définitions sont valables.

Premier sens: taper maladroitement sur quelque chose ou quelqu’un.
Les enfants tapochent sur des tambours bien avant d’en jouer. Ils tapochent aussi leur petite sœur. Donc, on tapoche sur quelque chose, mais on tapoche quelqu’un. «
Arrête de tapocher ta sœur!»

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Tapocher sur un instrument de percussion s’exécute sans rythme et sans retenue, créant des sons bruyants et désagréables.

Une taloche existe, mais pas une tapoche, pas vraiment, enfin trop peu pour le considérer. Le nom commun est quasi absent, seul le verbe est régulièrement employé.

Si «talocher» est surtout utilisé dans le sens de donner une ou des claques, tapocher peut se faire avec la main ou le poing ou même le pied.

En l’analysant dans un sens plus large, tapocher peut également exprimer «donner une rossée», «rosser quelqu’un» surtout lorsqu’il est utilisé comme un euphémisme dans une phrase menaçante. «Si t’arrêtes pas, m’a te tapocher!». Ou encore entre deux adversaires qui s’affrontent dans un ring «regarde le favori tapocher l’aspirant», «il lui donne toute une raclée».

Cette même phrase est également considérée au sens figuré. Tapocher devient ainsi une façon d’exprimer la venue prochaine d’une volée de mots crus ou insultants ou des représailles.

Expressions québécoises – 4

L’expression est : « courir la galipote ».

En français, il existe le galipot et les galipettes, mais pas la galipote.

Le galipot [galipo] est une résine exsudant des arbres résineux ou encore un produit destiné à imperméabiliser les coques de bateaux fabriqué à partir du galipot des arbres.

Les galipettes sont des cabrioles. Ce sont aussi des jeux coquins, des ébats où les pirouettes ne ressemblent en rien à celles de notre enfance. Faire des galipettes avec une jolie partenaire, ça tient son homme vert.

La signification de « courir la galipote » est : « Multiplier les rencontres amoureuses d’un soir ». «  Sortir et flirter tout ce qui bouge ».

En ce sens, « galipote » semblerait plus tenir des galipettes que du galipot, mais l’analyse ne se termine pas ici.

Quand on court la galipote, on picole. On boit pour flirter et on flirte pour frayer.

Académiquement, c’est mener une vie de débauche, plus spécifiquement axée sur des amours sans lendemain.

Le correcteur Antidote admet le mot galipote comme québécisme.

Courir la galipote n’est pas toujours gage de succès. On peut très bien courir la galipote sans marquer une seule touche. C’est plus dans l’intention que dans le résultat qu’on court la galipote. Pour certains plus habiles, le dénouement est plutôt assuré. Pour d’autres, ils auront beau courir la galipote, ils rentreront tout de même bredouilles.

En anglais, le mot galipot existe également. Il est parfois écrit « gallipot». Certains le prononcent comme galipot en français alors que d’autres prononcent le t, exactement comme pour le mot galipote. Il tire ses origines du mot français galipot et signifie la même chose, a pitch.

Il est donc possible que « galipote » provienne de la prononciation du mot galipot par des anglophones dont nous aurions calqué leur prononciation. D’ailleurs, la plupart des anglophones prononcent mon nom en insistant sur le t à la fin (Lecorbote).

Quant à la relation entre une résine et le fait de s’envoyer fréquemment en l’air, il se peut que pour fabriquer du galipot, il faille courir d’arbre en arbre afin d’en recueillir une quantité suffisante. Ainsi, on court après les conquêtes comme on court après le galipot. On court la galipote.

Expressions québécoises – 1

On dit souvent du langage parlé des Québécois qu’il est coloré. Ayant été abandonnés par la mère patrie qui brada la Nouvelle-France pour quelques perruques, une partie de notre langage et héritage français remonte au temps de la colonie et n’a pas évolué depuis, ou a évolué de façon bien différente de celui parlé de l’autre côté de la Grande Flaque. Malheureusement, il s’est également enrichi d’une foule de termes anglais que le vainqueur nous a imposés et dont nous nous efforçons aujourd’hui d’évacuer de notre langage. Mais les habitudes sont tenaces, parfois pour le mieux, souvent pour le pire.

Plusieurs vieilles expressions d’origine française et d’autres, plus récentes, font toutefois le plaisir des touristes venus nous visiter et qui les entendent pour la toute première fois. J’essayerai à l’occasion de vous en faire connaitre quelques-unes en vous transmettant mon interprétation personnelle, donc celle d’un usager sur le terrain des vaches, pas nécessairement celle des linguistes.

J’aimerais également savoir si une autre expression véhiculant le même sens existe par chez vous. Alors, ne soyez pas timide et laissez un commentaire.

Pour la première expression bien québécoise, quoi de mieux que d’être de saison.

L’expression est : « Attache ta tuque ! »

Sa variante longue est : « Attache ta tuque avec de la broche ! ».

Sa signification est : « Prépare-toi, parce que ça va chauffer, brasser, secouer, surprendre ou décoiffer ».

Une tuque est tout type de bonnet, principalement en tricot de laine, avec ou sans rebord, avec ou sans pompon ou gland au sommet, avec ou sans cache-oreilles à la péruvienne, avec ou sans cordon. Même si au Québec on utilise ce mot depuis plusieurs siècles, il n’a eu droit à son entrée dans le dictionnaire français que très récemment. Donc, avoir besoin d’attacher sa tuque et a fortiori avec de la broche signifie qu’on risque de se faire décoiffer d’aplomb. Le décoiffage anticipé est plutôt utilisé au sens figuré, comme pour qualifier un film d’action ou pour tout événement sortant du commun ou à suspense. Il peut évidemment s’appliquer au sens propre, comme pour l’essai d’un nouveau manège, d’une voiture sport ou à l’exécution d’une performance élevée ou particulière.

Quant à la fameuse broche, ce n’est ni un bijou, ni un instrument de tricotage, ni un outil pour la cuisson ni une agrafe. On nomme ainsi inadéquatement du fil métallique utilisé pour fabriquer du grillage à poulailler, du fil barbelé, etc.

Alors si vous venez nous visiter, sortez l’expression à un moment opportun, elle vous rendra instantanément hyper sympathique. Et n’oubliez pas de vous acheter une jolie tuque en souvenir, question de l’attacher à votre tête avec de la broche afin d’affronter les grands vents d’hiver ou avant de visionner le dernier Star Wars ou même avant de rentrer trop tard à la maison.

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