Les volcans de la décennie

La liste des volcans de la décennie est dressée par l’Association internationale de volcanologie et de chimie de l’intérieur de la Terre (sigle « IAVCEI » en anglais).  Les volcans s’y retrouvant sont dignes d’une étude particulière à la lumière de leur histoire éruptive large et destructive et de leur proximité avec des régions peuplées.

Ainsi donc, le mont Erebus basé en Antarctique n’apparaitra jamais sur cette courte liste même si son comportement venait à se dégrader puisqu’il ne menace personne. De même, aucun supervolcan n’y est inscrit même si ces monstres peuvent dévaster des continents entiers, car aucun d’entre eux ne montre de signes d’éruptions imminents (en temps géologique).

Les volcans susceptibles de voir leur nom inscrit sur cette liste doivent également répondre à plusieurs critères spécifiques liés à leurs types d’éjectats. Certains d’entre eux sont déjà en éruption, mais pas tous, loin s’en faut.

Voici donc en ordre alphabétique les seize volcans dignes d’intérêt pour la décennie actuelle.

On remarque dans cette énumération plusieurs noms inconnus. D’autres au contraire nous sont bien familiers comme l’Etna, un volcan pour le moins hyper actif. D’autres ont le don de grandement nous inquiéter, comme c’est le cas du Vésuve et du Santorin, pas pour leur humeur présente, mais pour leur passé hautement sulfureux ainsi que pour les nombreuses populations vivant aujourd’hui à leur pied.

J’ai comparé cette liste à celle de la décennie 1990-2000 pour vérifier si les volcanologues la modifient peu ou beaucoup au fil du temps. Force est de constater qu’ils ont de la suite dans les idées (ou de la paresse mentale) puisque voilà plus de trente ans, cette liste qui comportait un nom de moins recensait les quinze mêmes volcans que ceux apparaissant actuellement. Le seul nom rajouté depuis est celui du mont Rainier.

À propos de ce dernier, pour ceux qui ne le connaîtraient pas, j’ai déjà écrit un article le concernant. Disons qu’il est un proche cousin du mont St Helens, les deux faisant partie de la célèbre chaine des Cascades. Cependant, celui-ci dresse sa cime blanche dans la cour arrière d’une flopée de villes et villages de l’état de Washington aux États-Unis d’Amérique. Un brutal réveil comme on lui prédit signerait une catastrophe majeure. La photo ci-devant le représente dans toute sa majesté. Comme vous pouvez le constater, la montagne semble enceinte et ce qu’elle enfantera proviendra directement des enfers. Ce stratovolcan menace plus de 1,5 million d’habitants et même s’il semble plutôt calme, il est voué à totalement disparaitre en crachant violemment ses entrailles.

Noter que le Mauna Loa à Hawaï s’est réveillé à plusieurs reprises depuis la décennie 1990-2000, confirmant ainsi les prédictions des scientifiques.

Quant au Nyiragongo en RDC, le 22 mai 2021, le volcan connaît une nouvelle phase éruptive. Deux coulées se sont déversées dont l’une s’est arrêtée tout juste aux limites de la ville de Goma. 

En Indonésie, le Merapi menace 1,1 million d’habitants, tous empaquetés comme des sardines sur deux de ses flancs. Sa dernière éruption date tout juste du 27 novembre 2022.

Au Mexique, le majestueux volcan Colima menace grandement les 200 000 habitants de la ville homonyme. Une activité volcanique intense de type majoritairement explosif le rend particulièrement dangereux.

On ne s’étonnera pas de constater qu’il existe plus d’un volcan sous haute surveillance au Japon, il s’agit du mont Unzen qui a émis plusieurs nuées ardentes entre 1990 et 1995 et du mont Sakurajima dont la plus récente éruption d’envergure est survenue le 24 juillet 2022, forçant l’évacuation préventive de plusieurs zones d’habitation.

Le majestueux duo Avatchinski-Koriakski situé à l’extrême est de la Russie peut paraitre presque inoffensif puisqu’aucune éruption n’a entraîné de lourds dégâts matériels ou même des victimes humaines depuis belle lurette, mais sa proximité avec la ville de Petropavlovsk-Kamtchatski, la capitale du kraï du Kamtchatka et la nature explosive de ses éruptions ne laisse rien de présager de bon lorsqu’il entrera de nouveau en colère.

Les Philippines, bien connues pour ses nombreux volcans actifs, dont le tristement célèbre Pinatubo qui a explosé en 1991, possède également sur l’ile de Luçon le volcan actif Taal, une structure géologique très originale puisque le mont émerge au milieu du lac du même nom (la caldeira), mais sa curiosité ne s’arrête pas là. Cette ile contient dans son cratère un petit lac qui contient également une toute petite ile en son centre. On observe donc une ile dans un lac dans une ile dans un lac dans une ile ! Évidemment, sa présence sur la liste de la décennie ne tient pas à son originalité et les volcanologues ont eu raison de l’y inscrire puisque le 12 janvier 2020, il est entré en éruption après 43 ans de calme relatif.

Le Galeras est un volcan andin situé en Amérique du Sud, plus précisément en Colombie. Il entre fréquemment en éruption et certaines ont entraîné des dégâts matériels, mais aussi des morts comme en 1993. Le type éruptif, la fréquence élevée de ses éruptions ainsi que la proximité de la ville de San Juan de Pasto font en sorte qu’il représente un très bon candidat pour apparaitre sur la liste des volcans de la décennie.

La Papouasie–Nouvelle-Guinée n’est pas en reste. Située sur une faille tectonique propice à engendrer des volcans, l’un des plus dangereux se nomme Ulawun. Les laves émises par l’Ulawun au cours d’éruptions majoritairement explosives classent l’Ulawun parmi les volcans gris de la ceinture de feu du Pacifique. Le 26 juin 2019, l’Ulawun entre en éruption, provoquant un regain important d’activité sismique ainsi que l’évacuation de la région.

Le Santa María est situé dans le sud-ouest du Guatemala, tout juste au sud de l’importante capitale Quetzaltenango. Il fait partie de la chaine du Sierra Madre du Chiapas, une fourmilière de volcans qui domine la plaine côtière aux abords de l’océan Pacifique. Sa dernière éruption date du 22 juin 1922 et un siècle plus tard, elle est toujours en cours !

Le Teide est un stratovolcan situé sur l’ile de Tenerife, dans l’archipel des iles Canaries. Sa dernière éruption explosive remonte approximativement à l’an 800, il semble donc étonnant de retrouver son nom sur cette liste. Cependant, le risque d’une violente éruption n’est pas écarté et si elle devait survenir, elle pourrait avoir des conséquences très sévères sur cette ile, ses habitants et les innombrables touristes qui y circulent.

Je ne m’étendrai pas très longtemps sur le cas de l’Etna. Son importante activité éruptive, ses coulées de lave très fluides et la proximité de zones densément peuplées ont fortement joué en sa faveur pour l’inclure dans la liste des volcans de la décennie. J’ajouterai simplement ceci, je considère les habitants vivant à proximité comme étant dotés soit d’une insouciance de cigale, soit de gonades en amiante.

Que dire du Santorin ? Un volcan ayant vécu des centaines de violentes éruptions, crachant cendres et lave sur une période de plusieurs millions d’années. Une ultime explosion survenue il y a de cela 3600 ans fit éclater l’ile, ne laissant qu’un croissant rocheux au milieu de la caldeira sous-marine. La dernière grande éruption survint en 1925 et d’autres plus modestes se s’étalèrent jusqu’en 1950. Aujourd’hui, la présence de quelques fumeroles nous rappelle que sous les eaux un monstre sommeille.

Et à tout seigneur tout honneur, je termine cette déclinaison par le volcan probablement le plus emblématique et le plus célèbre de tous, le fameux Vésuve. En l’an 79 de l’ère actuelle, il ravage entre autres les villes d’Herculanum et de Pompéi. Ce faisant, la montagne est décapitée d’un bon tiers. Il est l’archétype du volcan gris causant des éruptions pliniennes, nom provenant justement de Pline l’Ancien qui y mourut et de Pline le Jeune qui décrivit les événements pour lesquels il fut un témoin direct. Aujourd’hui, la ville de Naples et ses 4 millions d’habitants pile sur les pieds de la montagne qui, pour l’instant, reste relativement stoïque, mais il serait totalement déraisonnable de s’y fier puisqu’elle demeure l’un des volcans les plus dangereux au monde.

Pour terminer ce long article, vous aurez sûrement remarqué la belle distribution géographique de ces seize volcans même si à certains endroits la Nature a été bien plus généreuse qu’à d’autres. Toutes les listes montrent des tares et celle-ci ne fait pas exception. Malgré qu’elle soit dressée par des volcanologues, elle ne sert qu’à ceux qui ne le sont pas. Pour leur part, il ne leur viendrait pas à l’idée d’utiliser cette courte liste pour définir leurs priorités. Les plus étudiés, les plus surveillés de tous brillent parfois par leur absence.

Aucun mot sur le Popocatepetl ou sur le Kelud. Silence total autour des multiples volcans d’Islande et rien sur les dangereux volcans des Antilles que sont le Piton de la Fournaise, la montagne Pelée et la Soufrière. Pas plus que le Cumbre Vieja, le Cotopaxi, Mayon ou l’Ijen n’y apparaissent.

Le fait que cette liste reste figée depuis près de quarante ans me questionne fortement sur sa pertinence. Je ne rejette pas tous les volcans qui y apparaissent, cependant je retirerais certainement le Mauna Loa, un volcan rouge qui a démontré son aspect bénin quasi total lors de ses dernières frasques et j’en ajouterais quelques autres, dont plusieurs parmi ceux que je viens de mentionner.

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Le volcan Taal s’ébroue

Le 12 janvier 2020, un autre volcan actif des Philippines a fait parler de lui. On en dénombre tellement dans ce pays que même Wikipédia ne les recense pas par leur nom. Taal est cependant l’un des plus dangereux d’entre eux, et même de tous les 1 670 volcans actifs de la planète.

Situé au sud de l’ile de Luçon, à seulement une soixantaine de kilomètres de la capitale Manille où vivent dans ses environs plus de 21 millions d’individus, le volcan a projeté de la cendre volcanique, du SO2, du CO2 et de la vapeur d’eau en bonnes quantités à plus de 15 km dans l’atmosphère.

10 000 personnes ont été évacuées et l’aéroport de Manille a connu des centaines d’annulations de vols afin d’éviter d’embourber les moteurs des avions passant trop près de la colonne de cendres.

Taal n’a pas encore montré sa vraie nature et cette éruption mineure pourrait n’être qu’un préambule à quelque chose de bien plus catastrophique. De fait, lorsqu’on regarde la carte (image d’entête), on voit un petit cône volcanique avec un lac de 3 km de diamètre en son centre , un cratère du volcan, ainsi qu’une petite ile perdue dans ce lac. Mais si on prend de l’altitude, on s’aperçoit que ce cône volcanique émerge du lac Taal. Ce lac constitue une bonne partie du véritable cratère de ce volcan géant, sa caldeira estimée à 267 km2 de superficie (image ci-après).

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Fait plutôt inusité, Taal possède donc une ile dans un lac sur une ile dans un lac situé sur une ile.

Dangereux et pourtant relativement passif depuis plusieurs siècles où ses explosions n’ont pas dépassé l’indice 4 sur l’échelle VEI qui en compte 8, le Taal s’est contenté jusqu’à maintenant de faire sentir sa présence sans trop perturber la vie des humains environnants. Je ne minimise pas la valeur des pertes de vies passées en m’exprimant ainsi. Lorsque plusieurs centaines de milliers de gens vivent tout près d’un volcan géant, c’est presque un miracle qu’il n’ait pas fait plus de victimes par le passé.

Pour l’éruption en cours, les mesures préventives modernes ont permis de déplacer toutes les personnes à risque et on ne déplore aucune perte de vie. Toutefois, qu’adviendra-t-il le jour où ce ne seront plus seulement quelques petits rots que le Taal émettra, mais des projections à la mesure de sa capacité réelle ?

Il sera impossible d’évacuer Manille et tous ses environs. Taal est un volcan gris capable de submerger la mégalopole sous des mètres de cendre volcanique dont le poids est six fois plus lourd que la neige fortement mouillée. Autant dire que la plupart des toits des habitations ne résisteront pas à cette charge. De toute façon, l’air sera tellement saturé de cette poudre de roche que le respirer conduira à une mort certaine. Il n’y a pas que les moteurs d’avions à craindre la congestion de ses voies respiratoires. Vos bronches se satureront de cette poussière de roche tranchante et indécollable qui vous fera suffoquer. Elle se mélangera à vos sécrétions et ainsi, vous vous noierez dans de la boue.

À moins que les tremblements de terre précédant l’éruption principale ne se soient employés à vous écraser sous les débris. Vous pourriez également mourir d’un tsunami engendré par les plus fortes secousses, ou brûlé de l’intérieur par une vague pyroclastique composée de gaz à plusieurs centaines de degrés Celsius. Il reste bien sûr une mort plus classique si vous vous faites assommer par un caillou qui aurait été projeté à des dizaines de kilomètres d’altitude avant de vous perforer le crâne au moment de terminer sa chute.

Un autre volcan tristement célèbre situé sur la même ile, le Pinatubo, a causé en 1991 et 1992 des dérèglements climatiques à la grandeur de la planète. Ceux que causera le Taal lorsqu’il décidera à montrer sa vraie nature risquent de dépasser ce que tout être humain a connu depuis l’Antiquité.

Heureusement, les rares volcans géants actifs comme le Taal retiennent leurs pires humeurs durant très longtemps, se contentant de faire sentir leur présence et leur somnolence qu’occasionnellement. Que peut-on attendre du Taal dans les jours et les semaines à venir ?

Le petit lac de cratère a disparu. Plus de 600 secousses sismiques ont été enregistrées. Le niveau d’alerte a été rabaissé, mais le volcan n’est pas pour autant hors d’état de nuire. Si vous devez vous rendre à Manille, personne ne peut prétendre connaitre le niveau réel de danger. Ne vous fiez donc à personne et utilisez votre propre jugement pour décider d’y aller ou de rester. Ça vous évitera de jeter le blâme sur quelqu’un d’autre advenant une catastrophe.

N’oubliez pas ces quelques vérités. La vie est dangereuse et souvent imprévisible. Se couper de tout danger reste une mission impossible. Ne faire que de bons choix dépasse les capacités humaines. Vivre, c’est aussi savoir prendre des risques. Mourir en n’ayant jamais rien fait, est-ce avoir vécu ? Mourir le sourire aux lèvres est l’apanage de ceux qui ont bien vécu. Mais pour vivre longtemps, il faut savoir évaluer les risques.

L’Antarctique, deux menaces

L’Antarctique est le septième continent. Il suscite beaucoup d’intérêt depuis quelques années. Il comporte un volcan actif, le mont Erebus. Sa couche de glace varie beaucoup d’un endroit à l’autre, certains lieux laissent apparaitre le sol rocailleux tandis qu’à d’autres, trois kilomètres d’eau gelée depuis des millions d’années recouvrent son sol en permanence.

Ce continent n’a pas toujours occupé sa position actuelle. La dérive des continents l’a amené à ce lieu très particulier du globe à partir du fractionnement du supercontinent la Pangée entamé il y a de cela 240 millions d’années.

Ce n’est plus un secret pour personne, le réchauffement climatique fait fondre des quantités phénoménales de sa glace qui a pour effet direct d’élever le niveau des océans. On compte encore ce rehaussement en millimètre, mais il s’accélère dangereusement. Il deviendra bientôt impossible de protéger efficacement plusieurs lieux densément peuplés de la planète contre les effets de cette élévation permanente. 

Les conséquences les plus évidentes surviennent lors d’ouragans, typhons, cyclones — ces trois mots désignent le même phénomène météorologique — lorsque la pression atmosphérique en forte baisse surélève le niveau des mers qui envahissent alors les terres côtières ayant le malheur de se trouver à basse altitude. Ces inondations occasionnelles deviennent aujourd’hui plus fréquentes, et ce, une fois encore, à cause du surchauffage de l’atmosphère et des océans qui dope les tempêtes tropicales.

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Ce problème ponctuel deviendra permanent lorsque l’élévation moyenne des océans finira par avoir le dessus sur plusieurs basses terres. Certaines villes mieux nanties pourront retarder l’inévitable en construisant des murs de rétention et en installant des pompes géantes, mais à plus long terme, elles seront elles aussi condamnées à disparaitre.

Les changements climatiques ne toucheront pas seulement les riverains. Nous subirons tous d’une façon ou d’une autre les multiples conséquences directes et indirectes de nos émissions des gaz à effet de serre.

Et parmi les conséquences indirectes de la concentration de méthane et de CO2 dans l’atmosphère, l’une d’elles concerne une fois de plus l’Antarctique.

Le septième continent cache bien des choses sous sa glace, dont tout un tas de volcans. On n’a pas fini de les compter et jusqu’à présent, on en a recensé 138. Pour l’instant, ils semblent endormis, mais un problème se profile à l’horizon et celui-ci émane une fois de plus du réchauffement de notre planète.

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Une analogie très valable consiste à voir un volcan comme une bouteille de champagne. Son magma accumule des gaz dissouts provenant de l’eau qui s’est infiltrée. Tant que le bouchon sur la bouteille parvient à retenir la pression interne, rien ne survient, tout reste calme. Toutefois, on connait la suite des choses si, pour une raison ou pour une autre, l’équilibre se rompt. Cette rupture peut provenir d’une hausse subite de la pression interne, comme lorsqu’on brasse la bouteille, ou de l’affaiblissement du bouchon.

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Pour l’Antarctique, le bouchon, c’est sa glace. En fondant, il s’affaiblit et un jour, la pression interne des volcans actuellement enfouis dépassera la capacité de la glace de la contenir. Lorsque le réveil sonnera, combien de volcans entreront en éruption simultanément ?

Ce mystère ne sera connu que le jour où la catastrophe surviendra. Il est impossible de la prédire, mais cette incapacité ne signifie aucunement qu’elle n’arrivera pas. Toutes nos connaissances actuelles pointent dans la direction d’un effet « bouteille de champagne ».

Ainsi, le seul continent inhabité (ou presque) nous menacera avec sa glace et ensuite avec son feu. Nous sommes en train de réveiller le dragon endormi dans sa prison en lui retirant l’immense couverture glacée permettant de le maintenir placide. Ce n’est vraiment pas une bonne idée ! Mais à quoi sert la prudence, sinon à nous empêcher de rester confortablement endormis sous une chaude couverture d’insouciance ?

Zone volcanique de Taupo

Il n’existe heureusement que très peu de supervolcans dans le monde. Le plus connu et surtout le plus médiatisé de tous est le Yellowstone aux É.U.A. Ce dernier mérite probablement son titre du plus dangereux et du plus susceptible d’éclater à tout moment.

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Si vous croyez que des supervolcans ressemblent au Vésuve, au Krakatoa, au Pinatubo, au Santorin, au Tambora, à la montagne Pelée, au Laki ou au mont St Helens, détrompez-vous, car ceux-ci ne sont que de vulgaires pets de nonnes à comparer aux véritables monstres que sont les supervolcans.

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Parmi cette courte liste, je vous ai déjà parlé de l’Ilopango au Salvador et du Toba à Sumatra ainsi que des champs Phlégréens en Italie, mais il y en a un autre que je n’avais jamais abordé.

Ce supervolcan est méconnu et pourtant ses dernières frasques sont plutôt récentes et elles ont été gigantesques. Sa position géographique l’aide peut-être à se faire oublier puisqu’il se situe en Nouvelle-Zélande, plus précisément sur l’ile Nord. Aujourd’hui, comme d’autres supervolcans, il se démarque, non pas par un joli cône, mais au contraire par sa cuvette, sa caldeira remplie d’eau et formant un immense lac, le lac Taupo.

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Voilà environ 26500 ans, le supervolcan Taupo est entré en éruption avec un indice VEI de 8, le maximum sur cette échelle d’éruptivité. Il a projeté dans les airs plus de 1000 km3 de cendre, de gaz et de roches. Pour point de comparaison, en 1883, le Krakatoa n’a atteint que le niveau 6, le Vésuve, un petit 5 et la montagne Pelée, seulement 4. Seuls les supervolcans atteignent l’indice 8 sur cette échelle qui multiplie par 10 la quantité d’éjecta à toutes les fois qu’elle grimpe d’un échelon.

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Les conséquences climatologiques de l’explosion qu’on nomme aujourd’hui «Oruanui» restent difficiles à quantifier puisque la Terre traversait déjà à cette époque un épisode d’intense refroidissement et il se trouvait pratiquement à son minimum. Il est possible que le climat ait plongé encore plus bas, c’est tout ce qu’on peut tirer comme hypothèse. Voilà la raison pour laquelle cet événement est passé presque inaperçu et pourquoi on n’en parle pratiquement jamais.

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On a su évaluer les quantités de gaz et de poussières émises dans l’atmosphère et à ce chapitre, il est clair qu’on a eu affaire à une super éruption, la dernière des 74000 dernières années où son frère, le Toba, faisait des frasques.

Le lac Taupo constitue aujourd’hui une partie de la caldeira du volcan. Ses dimensions de 20 km x 30 km montrent le gigantisme du géant somnolent. Toutefois, la zone volcanique au complet fait 350 km de long sur 50 km de large et comprend plusieurs volcans. Elle est causée par une zone de subduction qui fait remonter du magma des entrailles de la Terre par la pression générée par la plaque océanique lorsqu’elle s’enfonce profondément dans le manteau terrestre.

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La dernière importante éruption du Taupo date probablement de 230 de notre Ère. Une fois encore, celle-ci se perd dans les arcanes de l’histoire où l’on peine à lui attribuer une datation précise. Elle fut toutefois de bien moindre ampleur que celle du minimum glaciaire précédent.

Malgré son indice de dangerosité, on en connait très peu sur le Taupo. Il vient toutefois s’ajouter à notre sac à catastrophes mondiales potentielles. Une des particularités des supervolcans est qu’ils finissent tous par refaire de super éruptions un jour ou l’autre. Reste à savoir quand et de quelle ampleur, mais chose certaine, leurs prochains débordements ne seront jamais anodins.

Yellowstone, le cauchemar est-il commencé ?

Le parc de Yellowstone dans les états du Wyoming et du Montana aux É.U.A. abrite l’un des volcans les plus gros et les plus dangereux de la planète. Lorsque je me suis intéressé pour la première fois à ce supervolcan, personne n’en faisait de cas. Maintenant, on en entend abondamment parler, mais quel est l’état réel de ce volcan capable de créer un hiver permanent à la grandeur de toute la planète ?

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Comme dans toutes les disciplines scientifiques incomprises, les avis divergent énormément d’un spécialiste à l’autre. Cependant, aucun géologue n’est réellement spécialiste du Yellowstone. Pourquoi ? Parce que sa dernière éruption globale est survenue voilà 640 000 ans. Parce qu’il n’est pas un volcan comme les autres. Parce qu’il possède une taille totalement disproportionnée. Parce que ce genre de volcan – il en existe quelques-uns sur la Terre – n’est jamais entré en éruption de mémoire d’homme et ainsi, on ignore totalement leur comportement et leurs signes avant-coureurs.

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L’USGS (United States Geological Survey) estime à 1 sur 730 000 la chance d’une éruption récente, sans spécifier ce que le mot « récente » signifie. Un professeur de l’Université du Colorado croit, pour sa part, qu’il est dans une phase d’endormissement et qu’il ne se réveillerait que dans 1 ou 2 millions d’années. Pourtant, ce volcan possède un cycle éruptif relativement régulier tournant autour de 600 000 ans. Ce professeur a probablement été payé pour endormir les craintes des gens.

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Les geysers du Yellowstone connaissent actuellement une phase d’activités plus intenses. Ces jets d’eau et de vapeur restent néanmoins des signes relativement mineurs des humeurs du ténébreux volcan et ne devraient pas être considérés comme un oracle, toutefois ils ne peuvent pas être ignorés non plus.

Un autre signe très surveillé est l’activité sismique dans la caldeira. Dernièrement, on a noté une forte recrudescence du nombre de secousses, sommes toutes mineures, cependant ce regain d’activité inquiète certains spécialistes. On en dénombre maintenant plusieurs centaines par semaine. Ça ne semble pas poser de grandes angoisses pour l’instant, mais en colligeant tous les changements comportementaux du méchant dragon, je ne partage pas entièrement l’optimisme des géologues chargés de surveiller le sommeil du géant.

La prochaine éruption du Yellowstone atteindra le niveau VEI 8 sur l’échelle d’indice d’explosivité volcanique, le maximum possible. On le qualifie d’ultra-plinien apocalyptique puisque le monstre souterrain rejettera plus de quatre mille fois la quantité de cendres de l’explosion survenue au mont St Helens en 1980. Il recouvrira la moitié du sol des É.U.A. sous plusieurs centimètres de cendres rocheuses. Ses déjections atteindront la stratosphère à 100 km de hauteur et seront transportées à la grandeur de la planète. À cause de cette poussière omniprésente, la température chutera partout de plusieurs degrés, la photosynthèse s’effectuera très difficilement et causera des disettes et des épidémies catastrophiques un peu partout.

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Dans mon esprit, le Yellowstone se rapproche dangereusement d’une phase éruptive majeure, mais à l’échelle géologique, les temps ne se comptent pas en semaines ni même en mois. Nous aurons probablement le temps de terminer notre existence sur la boule bleue avant qu’il n’entame ses frasques, mais qui sait ? J’aurai peut-être la chance de regarder l’humain se faire remettre à sa place par la Nature qui lui montrera une bonne fois pour toutes qu’il n’a été qu’une vulgaire mouche agaçante à sa surface.

Le Mauna Loa tremble

Les iles Hawaï se sont formées par un volcanisme dit de « point chaud ». C’est une sorte de chalumeau qui fait remonter la chaleur du manteau terrestre en surface en transperçant la croûte terrestre. La dérive de la plaque continentale Pacifique fait en sorte que de nouvelles iles se sont créées, formant un chapelet d’iles.

Le Mauna Loa est un volcan en activité sur ces iles. Il vient de fortement trembler, 6,9 sur l’échelle Richter d’après mon application qui les répertorie. Ceci n’annonce rien de bon. D’ailleurs, des centaines de petites secousses se sont fait sentir depuis plusieurs jours.

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Le Mauna Loa est une montage qui, lorsque mesurée depuis sa base au fond de l’océan, fait 17 kilomètres de haut. C’est le plus haut volcan du monde. Sa superficie couvre la moitié de son ile. Il fait partie de la catégorie des volcans rouges, c’est-à-dire que sa lave pauvre en silice coule de manière fluide. Ainsi, les éruptions cataclysmiques ne font pas vraiment partie de son registre. Ce sont ses coulées de lave qui le rendent dangereux, car elles menacent les populations avoisinantes lorsqu’elles s’écoulent rapidement.

L’augmentation accrue des petites secousses et cette dernière à 6,9 sont annonciatrices d’épanchements en hausse. Bonne chance à tous les habitants se trouvant à proximité.

Photo : fineartamerica.com ;

Un dragon endormi

18 mai 1980. Un suspect est sous haute surveillance. Malheureusement, à 8h32, il tue plusieurs de ses gardiens en causant une explosion qui les prend par surprise. Ce drame se passe aux États-Unis dans l’état de Washington. Le coupable est le mont Saint Helens. Il crache une quantité impressionnante de cendres en plus de raser tous les environs. La déflagration retranche 400 mètres du sommet du mont, mais surtout, il emporte la vie de 57 personnes.

Le mont Saint Helens fait partie de la chaine des Cascades qui comprend 27 volcans en Colombie-Britannique et dans trois états étatsuniens. En fait, malgré la violence de cette éruption de 1980, ce sera un rot à comparer à ce qui surviendra quand son grand frère, le mont Rainier, décidera de l’imiter. Cette superbe montagne, semblant un peu trop gonflée pour être inoffensive, engloutira la petite ville de Tacoma sous des milliers de tonnes de boue qui dévaleront ses flancs lorsque ses glaciers permanents fondront d’un seul coup.

La ville de Seattle risque également d’écoper lourdement ainsi que plusieurs autres agglomérations qui se trouveront dans le chemin des coulées de lave, de boue ou de coulées pyroclastiques et sous les cendres et gravats volcaniques qui pleuveront sur une partie importante de l’ouest des États-Unis.

Le mont Rainier est considéré comme un volcan dangereux et est surveillé en permanence. Il y a 5000 ans, une éruption a fait disparaitre 400 mètres de son sommet. Une coulée de boue monstrueuse s‘était alors frayée un chemin jusqu’à l’océan Pacifique en se jetant dans le Puget Sound. Ce scénario risque de recommencer bientôt. Une fois de plus, un volcan nous rappellera que la Terre est dynamique et que nos vies sont bien peu de choses lorsqu’on se tient trop près d’un dragon endormi.

Mont Rainier – Crédit photo: Lyn Topinka – USGS

Quel destin pour les Napolitains ?

Naples est une ville d’un million d’habitants, quatre en comptant son agglomération, une ville comme on en retrouve un peu partout sur la planète. Ce qui la caractérise toutefois, c’est d’être située au pied d’un mont tristement célèbre, le Vésuve. Ce volcan à la source de la pulvérisation les villes de Pompéi et d’Herculanum en 79 de notre Ère n’est pas éteint. Il est en dormance plus ou moins profonde, car sa dernière éruption strombolienne date seulement de 1944. Cette région de l’Europe, et plus particulièrement de l’Italie, se trouve à la jonction de deux plaques tectoniques qui se télescopent. De fait, la plaque africaine emboutit la plaque eurasienne et fait apparaitre dans cette région une grappe de volcans formant l’arc campanien. Mais Naples ne sera peut-être pas ravagée par son imposant et funeste voisin.

C’est stupide de construire une métropole aussi près d’un volcan aux humeurs massacrantes, dirions-nous. Bien que le Vésuve soit atteint de plusieurs centaines de spasmes par année, depuis le terrible épisode plinien du début de notre Ère, les habitants de Naples ont heureusement survécu jusqu’à maintenant. Les sautes d’humeur du Vésuve se sont avérées plutôt banales si on ose les comparer avec celle qui rendit le volcan célèbre. Alors, le sort de cette ville italienne est-il sûr ou est-il compromis ?

Il ne faut pas s’y laisser prendre, le Vésuve laisse clairement planer un destin funeste sur Naples et un jour ou l’autre, son bouchon finira par sauter, détruisant tout aux alentours. Cette ville, célèbre pour sa sauce tomate, verra certainement des effusions rouges d’autres types, car non seulement les Napolitains ont eu la mauvaise idée d’ériger leur ville à l’ombre de cette inquiétante montagne, elle se trouve également à proximité d’un autre volcan encore plus dangereux, même s’il est pratiquement inconnu. On l’appelle champs Phlégréens. Cette caldeira apparait comme une vaste étendue plate d’où émergent des fumeroles et des sources d’eaux chaudes. Les colons grecs lui ont donné son nom dont la signification est « champs brûlants ».

Pour faire court, les Napolitains vivent au-dessus d’une chambre magmatique de 400 kilomètres carrés qui pourrait exploser à tout moment. Les champs Phlégréens sont l’un des rares supervolcans de notre planète au même titre que le Yellowstone aux USA. Ce sera donc le Vésuve qui servira d’exutoire à la pression magmatique croissante ou ce seront les champs Phlégréens. Ainsi, les bouillant Napolitains jouent littéralement avec le feu et un jour, puisque tout ce qui fume finit par cracher, demandez à un pneumologue, ce coquet coin de pays finira par être rayé de la carte ainsi que tous les habitants qui n’auront pas eu le temps ou la sagesse de quitter cette zone. Alors, à votre avis, lequel de ces volcans finira par avoir raison des Napolitains ? Le vénérable et illustre Vésuve ou les vastes et méconnus champs Phlégréens ? Peu importe lequel des deux, mais ne prenez pas cette gageure avec un Napolitain, vous risqueriez de devoir chercher vos gains à travers un tas de cendres de plusieurs dizaines de mètres de profondeur. En revanche, si vous perdez, il ne viendra jamais exiger son dû.

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