Un jour comme un autre

Les jours se suivent et ils ont tous la même durée, la même forme cyclique. Tous commencent par un lever et se terminent par un coucher du soleil. Les heures de ces événements changent avec la révolution de notre Terre autour de notre étoile, mais encore là ce comportement reste cyclique.

Nous grandissons, nous nous apparions, nous nous reproduisons, puis nous mourons. Durant notre vie adulte, nous travaillons, nous dépensons notre salaire, nous entretenons et réparons nos possessions, puis nous recommençons. La vie semble simple et pourtant elle ne l’est pas. Sous des airs répétitifs, chaque jour nous apporte un soupçon de différence qu’on peut apprécier ou exécrer.

Je ne parle pas des gros malheurs occasionnels, décès, divorces, opérations chirurgicales. Je ne parle pas des gros bonheurs inhabituels, mariages, naissances, voyages. Je parle de moments presque anodins qu’on passe souvent sous silence parce qu’ils ne semblent pas suffisamment spéciaux pour être mémorisés et ensuite divulgués.

Pourtant, à l’instar des révolutions de notre planète autour du soleil, les révolutions humaines ne se produisent pas subitement comme on pourrait être porté à le croire. Elles se forment une brique à la fois, un changement ténu à la fois, une subtile différence à la fois, un tout petit arc de cercle à la fois.

Un jour comme un autre, la révolution contre les changements climatiques éclatera. Mais elle ne naitra pas ce jour-là, elle aura pris naissance dans le cœur de tous ceux qui observent et qui attendent, qui accumulent jour après jour les soupçons de différences, qui ont l’espérance mais ont perdu l’espoir.

Un jour comme un autre, lorsque le soleil se sera levé comme tous les matins, un jour comme un autre le pavé sera jeté dans la mare, un jour comme un autre les empêcheurs éternels seront réduits à se taire et à suivre, un jour comme un autre ne sera pas un jour comme les autres.

Un jour viendra où la folie humaine s’arrêtera. Reste à savoir si un jour, les historiens se rappelleront, écriront et raconteront ce qui se tramait dans le cœur de bien des gens depuis tant d’années ou s’il ne restera plus d’historiens pour perpétuer la connaissance de ce jour apparemment comme un autre où tout a basculé.

Trop de mauvaises idées

Trop de monde sur Terre signifie aussi trop de mauvaises idées pour pouvoir toutes les contenir. L’humanité a depuis longtemps dépassé le nombre optimal d’individus au-delà duquel le contrôle des mauvaises idées devient une tâche impossible. Puisque le capitalisme est basé sur la croissance absolue et surtout ininterrompue, le nombre d’humains a explosé afin de soutenir un régime économique aux accointances cancéreuses.

Les mauvaises idées se sont, elles aussi, multipliées sans que personne puisse y faire grand-chose, car pour juguler une horde de celles-ci, les ressources nécessaires dépassent largement les quantités disponibles. De fait, même si la croissance du nombre d’individus s’applique apparemment de la même façon aux bonnes et aux mauvaises idées, la réalité s’avère tout autre.

Comme un gardien de but, une population peut bloquer une mauvaise idée, mais pas une volée de centaines de bourdes lancées simultanément. Avec la croissance exponentielle de la population, les mauvaises idées ont largement dépassé la quantité pouvant être gérées, contenues, contrôlées ou abattues.

Des gens peuvent se mobiliser une à deux fois par année, mais pas à tous les jours. Ainsi, les mauvaises idées finissent inévitablement par envahir nos vies sans opposition digne de ce nom et ce phénomène est survenu sans relâche depuis plus d’un siècle.

En dépassant le milliard d’individus, la population mondiale a perdu sa capacité de contenir les fous et leurs œuvres de destruction. Tous ces ravages poignent au grand jour depuis des lustres et pourtant nous sommes restés et restons toujours de marbre. Mers de déchets, réchauffement climatique, dégringolade de la biodiversité, déforestation, monocultures, maladies engendrées par la pollution et les pesticides, l’avenir n’est pas sombre, mais opaque, gluant et nauséabond.

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La situation est bien décrite dans les films des Avengers. Notez toutefois que le mauvais rôle est tenu par celui qui apporte une solution drastique, celui voulant faire cesser nos folies. La façon de penser ce scénario est intimement liée à notre perception du problème et de la solution. Le problème, ce sont les autres. Le problème, c’est la solution promue. La solution, c’est de ne pas toucher au problème. Et enfin la solution apportée réside à détruire la solution. Suis-je le seul à avoir désiré la victoire décisive de Kronos?

Et vous gardez toujours espoiren l’humain? Alors, ce n’est plus de la naïveté, c’est de l’entêtement acharné! Notre mode de vie est tellement bien ancré que nous refusons tout autodiagnostic pouvant nous apporter la preuve de l’existence d’une quelconque maladie, d’une possible tare, d’un évident défaut ou d’une monstruosité. Notre décadence basée sur le gaspillage, la surconsommation et l’appât du gain pour combler ces désirs aussi irrépressibles qu’inutiles bloque toute introspection. Elle s’avèrerait beaucoup trop douloureuse, alors nous lobotomisons notre sens critique.

En ces temps de noirceur de moins en moins incertains, voici pourtant mon seul conseil et croyez-moi, il ne se veut même pas ironique. Terminez en beauté cette belle aventure. Allez-y! Continuez de voyager partout sur la planète, dépensez immodérément, amusez-vous à tous les instants, soûlez-vous la tronche, défoncez-vous, vivez comme s’il n’y avait pas de lendemain, car bientôt le soleil se couchera et à son prochain lever, le monde chimérique actuel aura disparu à jamais.

Les temps auront irrémédiablement changé et vous détesterez le résultat, vous haïrez les conséquences desquelles vous êtes restés totalement sourds, froids et distants durant tant d’années. Alors, aussi bien en profiter maintenant puisque la Terre se trouve juste sur le point de basculer. Il faut bien que le grand ménage des mauvaises idées s’accomplisse de temps en temps!

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Le choix de ses erreurs

George Bernard Shaw: «La réussite ne consiste pas à ne pas faire d’erreurs, mais à ne jamais refaire la même.»

Albert Einstein: «La folie, c’est de refaire toujours la même erreur et s’attendre à ce que les résultats soient différents.»

Akio Morita: «N’ayez pas peur de faire une erreur, mais faites en sorte de ne pas faire la même erreur deux fois.»

Francis Nicolas: «Tout le monde mérite une deuxième chance, mais pas pour les mêmes erreurs.»

Ces exemples reviennent comme pâquerettes au printemps. En lisant des centaines de blogues, il est fréquent de tomber sur l’une d’entre elles, ou l’une de ses variantes prétendant la même chose.

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Bon, on comprend le principe. Tu commets une erreur, tu saisis le message, tu changes de stratégie, tu ne fais plus cette erreur et tu finis par obtenir ce que tu voulais. C’est la recette la plus simple du succès.

Ce processus en rien compliqué vous semble la seule bonne chose à faire, n’est-ce pas? Comme le prétendait Einstein, seul le fou répète ses erreurs. Vous adhérez allègrement à ce concept d’une logique implacable. L’erreur est compréhensible, nous sommes tous humains, mais la répéter démontre un signe évident qu’un engrenage mental a perdu quelques dents.

Pourtant, aussi vrai que ce processus par lequel l’humain apprend de ses erreurs peut paraitre indiscutable, celui-ci contient un profond problème systémique. Cette belle mécanique ne comporte aucune morale.

Dans toutes ces belles citations, personne ne s’est penché sur la cause et la provenance de l’erreur initiale et lorsqu’on prend le temps de faire cette analyse, on découvre une vérité bien différente. Je vais donner un seul exemple, mais il en existe des centaines qui pourraient illustrer mes propos.

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Prenez une personne particulière dans un groupe de travail. Le projet sur lequel trime l’équipe échoue. Les autres individus utilisent un trait de caractère de cette personne pour lui jouer dans le dos, pour l’isoler, pour lui faire porter le chapeau des gaffes commises, des retards survenus, du chaos que certains ont sciemment entretenu. Cette caractéristique qui l’a rendue vulnérable n’est que sa franchise. En étant honnête, elle s’avère être dangereuse pour tous les autres puisqu’elle ne manquera pas de raconter une version passablement juste des événements réellement survenus au sein du groupe.

Cette personne honnête est jugée par ses supérieurs avant même d’avoir pu donner sa version des faits et même si elle le faisait, on ne la croirait pas puisque les autres l’ont désignée pour s’en servir comme bouc émissaire. Constituant une menace, elle doit disparaitre et elle portera les responsabilités de cet échec. Une pierre, deux coups. Tous ne peuvent mentir, croient alors les autorités. Pourtant elles ont tort, mais la personne honnête est écartée.

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Voilà la situation, voilà l’échec. La cause de celui-ci est d’avoir été une personne intègre vivant dans un monde qui ne l’est pas.

Si la personne est intelligente, d’après les dictons, elle ne refera plus cette erreur. La prochaine fois, elle s’alliera aux menteurs plutôt que de rester honnête et elle parviendra ainsi à éviter l’ostracisme.

Mais si elle choisit en toute conscience de ne pas verser du côté obscur de la Force, alors elle commettra la même erreur encore et encore.

Peut-on toujours considérer comme étant folle une personne faisant ce choix réfléchi et assumé? Folle de garder ses principes d’honnêteté et d’intégrité?

Je vais répondre pour vous. Oui, cette personne est réellement folle, car la vie ne fonctionne pas sur ces principes et il faut être complètement fêlé pour nager volontairement à contre-courant.

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J’étais, je suis et je resterai un de ces fous. J’ignore pourquoi, je sais simplement que je suis conçu ainsi. Les erreurs des autres, je les ai portées et je les porte encore.

La prochaine fois où vous entendrez, où vous lirez une de ces citations qui déclare que commettre plusieurs fois la même erreur est à éviter, est à proscrire de sa vie, rappelez-vous simplement que certains ne le font pas pour répéter une erreur, ils font ce choix parce que leur morale ne peut faire autrement que d’espérer un résultat différent avec des gens qui pourraient s’avérer différents, et ce malgré la répétition ininterrompue des actes de trahison.

Un si détestable papillon !

Oui, je sais, nous ne sommes pas dans la saison des papillons. Vous ne m’apprenez rien, je suis sorti dehors pas plus tard qu’aujourd’hui et la pluie verglaçante, les bancs de neige et le bal des déneigeuses me l’ont clairement montré. Alors pourquoi un papillon me ferait-il rager en plein cœur de l’hiver ? C’est que je parle d’un foutu papillon coriace, une teigne indécrottable, un papillon de calibre himalayen. Vous le voyez ? Non ? Attendez un peu et vous comprendrez tout.

Ouais, je vois votre petit sourire en coin, votre œil condescendant et votre main me tapotant le dos en me disant que tout ira mieux demain tout en sachant pertinemment que demain, rien n’aura changé. LeCorbot fait de la fièvre à l’année, il pète des bulles que lui seul voit, il saute une coche ou des coches sans préalablement préparer convenablement ses lecteurs ahuris.

Bon, j’avoue, être LeCorbot à longueur d’année, ça joue sur les nerfs, les vôtres, mais surtout les miens. Je suis quand même assis dans la première rangée, je vous le signale et s’il réussit à m’énerver, je vous imagine stressés et je vous plains. Mais vous ne connaissez pas ce putain de papillon, sinon vous seriez vous aussi en train de mordre les sangles de la chemise blanche à très longues manches qu’on vient de me passer ! Comment fais-je pour écrire ? J’ai du nez, ça aide, il ne faut pas se presser. Et puisqu’on vient tout juste de me signifier que je passerai un méchant bout de temps en dedans, j’ai tout mon temps.

Je pousse des jurons que très rarement, mais là, franchement, je n’en peux plus. Le prochain qui me parle de cet enfoiré de papillon, je lui ferai subir les affres de mes incantations vaudou, version 2.0. Oui, je viens de les améliorer en égorgeant, en étripant, en écartelant et en faisant brûler la fameuse marmotte censée prédire sous peu l’arrivée du printemps. Oui, oui, j’avoue, certains animaux me tournent en bourrique. Hé ! Bourrique, c’est un âne, alors le compte est maintenant rendu à 3. Un papillon, une marmotte et maintenant un âne. Ne manque plus qu’un poisson pour compléter ma collection des animaux peuplant tous les écosystèmes de mon intolérance.

Mais avant, juste avant de me considérer irrémédiablement cinglé pour oser m’en prendre à une créature aussi inoffensive que le gentil papillon gnan ! gnan !, donnez-moi la chance de prouver mon point et vous direz comme moi, quoique j’en doute, vade retro papilio satana.

Bon, voilà que mon nez coule à cause de la grippe. Il m’est impossible pour l’instant de vous écrire sans faire risquer la noyade à mon clavier. Vous devrez attendre demain pour enfin savoir pourquoi cette infernale bestiole me rend aussi fou. Non, c’est vrai, j’étais fou bien avant de la rencontrer, mais elle n’a absolument rien arrangé. Demain, je vous le promets, vous saurez pourquoi ce papillon me tape autant sur le système.

Ne soyez pas triste de cette attente forcée. Dites-vous au contraire que vous aurez vécu un jour de plus dans votre vie sans avoir connu ce détestable fléau qui vous poursuivra par la suite, sans relâche, pour le reste de votre existence soudainement devenue misérable, pour ne pas dire minable, pour les siècles à venir.

Demain, je vous promets de me forcer à ne pas donner des noms d’oiseaux au vilain papillon et à passer directement au propos principal. Tiens, ça me fait penser, je vais déposer une plainte à l’Académie de la langue française pour qu’on cesse d’associer les noms d’oiseaux à des jurons pour les remplacer par des noms de papillons, bien plus signifiants à mon avis. Entre ces deux espèces volantes, vous verrez, une vilenie sans aucune commune mesure émane du papillon.

Il faut bien que je défende ma propre espèce ! Sinon, qui le fera ? Certainement pas le papillon ! Avec toutes mes insultes, sa complicité avec ceux-là mêmes qui m’ont enfilé une camisole au style très peu tendance est fortement suspecte.

Je vous laisse, je dois me moucher… mais comment vais-je bien m’y prendre ?

Photo : planete.qc.ca