Complété n’est pas synonyme de terminé

L’autre jour, j’abordais le sujet d’écriture de fiction, car depuis deux ans, j’écris un roman qui se veut un préambule à un autre roman écrit celui-là il y a une vingtaine d’années. L’œuvre sera bientôt prête. Le terme bientôt doit être compris dans le sens d’un bientôt écrivain. C’est donc que l’histoire est complétée et actuellement je me farcis la énième passe de corrections avant de la considérer comme étant plus ou moins terminée.

Sans l’avoir délibérément décidé au début de l’ouvrage, je me suis retrouvé à écrire environ cent-cinquante segments que j’ai ensuite rassemblés en les raboutant chronologiquement. D’une idée à l’autre, le roman prenait ainsi de l’ampleur et de la complexité tout en conservant une ligne directrice précise. L’œuvre met en scène une quarantaine de personnages dont seulement quelques-uns, une vingtaine d’années plus jeunes, proviennent du roman original. Bien sûr, tous les rôles ne s’équivalent pas. Certains d’entre eux passent comme des étoiles filantes tandis que d’autres se retrouvent dans plusieurs occurrences. Très peu ont l’honneur de tenir l’un des principaux rôles.

Je ne recommanderais pas de choisir cette technique d’écriture puisqu’elle engendre d’énormes difficultés, dont celle de gérer l’horaire de tout ce beau monde. Les invraisemblances temporelles se multiplient rapidement lorsqu’une aussi grande quantité de personnages interagissent et discutent d’événements s’enchainant en cascade alors que l’écriture fut tout sauf linéaire. 

Ce livre me fournit une multitude de difficultés à surmonter, mais selon moi, les défis font partie du plaisir d’écrire. C’est un roman d’action à saveur policière, une histoire contemporaine inventée, mais plausible qui ne m’a pas été inspirée d’un fait quelconque. Malgré ma propension naturelle à utiliser des concepts scientifiques, ici je n’en aborde aucun, ou si peu !

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J’ai beaucoup aimé fabriquer ce scénario où une foule d’histoires disparates s’entrecroisent et s’entrechoquent, pour finalement toutes s’incorporer dans la grande toile de fond. Un fait étrange, presque ésotérique de l’écriture, est lorsque je ponds des personnages d’arrière-plan dès le début sans savoir s’ils pourront jouer un certain rôle et qui, beaucoup plus loin, se voient confier une partie essentielle de l’histoire. Ne pas l’avoir eu sous la main, il aurait fallu que je l’invente. Donc, celui-ci n’apparait pas subitement, comme tiré d’un chapeau. Je n’ai pas non plus à reprendre plusieurs segments pour lui composer un passé, il possède déjà un vécu. 

Actuellement, même si je décrète cette histoire complétée, je me permets encore de rajouter quelques paragraphes ici et là afin d’améliorer la fluidité ou la compréhension générale.

Même si écrire un roman exige des efforts considérables, cet exercice recèle une foule de plaisirs et de satisfactions que toute personne peut connaitre tant qu’elle accepte les sacrifices inhérents. Composez une histoire simple, un cadre limité, quelques personnages et voilà ! Mais je vous mets en garde, le vrai travail d’écrivain commence à partir du moment où l’œuvre est complétée. Car si elle contient bien tous les éléments nécessaires, ceux-ci ne prendront de la valeur que sous le martelage intensif des touches de votre ordinateur. Seules d’innombrables lectures fastidieuses ponctuées de retouches simples ou en profondeur amèneront le travail à un niveau acceptable permettant aux lecteurs d’éprouver de l’intérêt et du plaisir.

Vous verrez également qu’un roman restera toujours une œuvre inachevée. À un certain moment, l’écrivain doit accepter de la délaisser et lorsqu’il le fait, c’est toujours à contrecœur. Si vous n’éprouvez pas ce sentiment devant votre œuvre, relisez-la comme un lecteur étranger, pas comme l’auteur, et vous verrez exploser les points à améliorer.

Les romanciers ne terminent jamais leurs œuvres, seuls les lecteurs les terminent lorsqu’ils les referment, en espérant que cela survienne après qu’ils aient lu la dernière page.

Écrire de la fiction

Je trouve une sorte d’équilibre dans l’écriture en orientant mes travaux le long de deux pôles. Les premiers sont consacrés aux œuvres de fiction. Romans, nouvelles, poèmes, je garde normalement ces écrits à l’extérieur de mon blogue, sauf à l’occasion, un poème, puisque son format se prête à celui d’un article de blogue. Ce sont les seules œuvres de fiction que je m’autorise à placer ici, car oui, ma poésie est fictive. Tous les autres articles écrits depuis trois ans ne contiennent que du contenu original et sont exempts de fiction. Vous pouvez donc être assuré de lire ce que je pense parce que je pense chaque mot que j’écris.

Comment faire alors pour écrire ce que l’on ne pense pas ? Comment écrire de la fiction ? Il n’est pas donné à tout le monde d’inventer de toute pièce et aisément des histoires crédibles. Certains signes peuvent aider à savoir si ce travail pourrait s’avérer plutôt facile ou, au contraire, passablement ardu.

J’avise immédiatement le lecteur. Mon opinion ne vise aucunement à décourager quiconque d’écrire de la fiction. Elle présente plutôt une façon de reconnaitre des talents innés, ou à se préparer à vivre quelques difficultés conséquentes. Rien n’est impossible lorsqu’on accorde le temps, les techniques et les efforts adéquats.

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La page blanche. Tout d’abord, voyons ce syndrome un peu embêtant pour un auteur de fiction. Si la page blanche l’assaille systématiquement, écrire de la fiction risque d’être un exercice difficile puisque celle-ci exige en général une imagination abondante et une inventivité flexible. Car, non seulement faut-il créer une histoire tirée (presque) du néant, mais elle devra bien souvent être triturée pour qu’en version finale, l’histoire coule le plus fluidement possible.

L’introspection versus l’extrospection. Un auteur plus à l’aise avec l’introspection pourrait trouver son style dans le récit, la biographie, le portrait, la poésie, les œuvres techniques plutôt que les œuvres de pure fiction. Tous les styles apportent leur lot de difficultés, mais choisir le plus naturel pour soi, du moins au début, permet d’accomplir et de terminer plus efficacement ses premières œuvres.

L’observation. C’est possible d’inventer des personnages ex nihilo qui ne sont pas des entités extraterrestres quelconques. La plupart des auteurs s’en tiennent à créer des humains. Les expériences de vie et les observations portées sur le monde entrent grandement en ligne de compte dans la facilité qu’aura l’auteur à imaginer une brochette de gens aux comportements distincts sans qu’ils soient des copies d’autres personnages, de personnes de son entourage ou de lui-même. Observer, c’est accumuler une panoplie de comportements différents permettant de créer une banque d’idées servant ensuite à composer des caractères originaux crédibles.

L’analyse. Inventer des personnages et des histoires ne suffit pas à écrire de la fiction. Un auteur doit posséder certains talents d’analyste pour revoir tous les aspects de son œuvre. La cohérence est ici le mot clé de toute bonne histoire de fiction puisque l’auteur désire faire d’une irréalité une vérité plausible aux yeux de son lectorat.

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L’autocritique et l’humilité. Une histoire fictive n’est pas bornée par la réalité, cette grande liberté contient également les germes menant à l’invraisemblance. Un auteur de fiction doit donc appliquer une autocritique à chaque étape de son travail. Sans cette capacité de se relire comme étant une personne distincte de l’auteur, écrire de la fiction risque d’engendrer des œuvres défaillantes et causer plus de frustrations que de plaisirs. Reconnaitre sans effort, sans gêne et sans amertume les faiblesses dans son travail apporte les outils permettant son amélioration et son peaufinage.

Les dialogues. Presque essentiels à toute œuvre de fiction, les dialogues se doivent d’être crédibles et percutants. Deux ou plusieurs personnes, la plupart du temps très différentes, échangent, s’opposent et s’influencent mutuellement. Il ne peut pas exister un seul style de langage, les gens sont différents et parlent différemment. Si l’auteur trouve difficile d’imaginer des mots dans la bouche d’autres personnes que lui-même ou ses proches, des mots qu’il n’a jamais entendus ou prononcés de sa vie, des mots qu’il n’ose pas prononcer ou même imaginer, des façons de dire qui ne sont pas les siennes, ces limites peuvent rendre l’écriture de fiction plus complexe.

Inutile

L’abandon. Enfin, le dernier mais non le moindre, pouvoir abandonner une mauvaise idée, un mauvais chapitre, une mauvaise décision, un mauvais personnage semble plus facile à penser qu’à faire. Tuer une partie de son œuvre n’est jamais simple pour un auteur ayant mis tout son cœur dans une idée qui s’avère être une erreur parmi le reste de l’œuvre. Je me suis donné un truc pour accepter de me débarrasser d’un personnage ou d’une idée inappropriée. Il ne faut jamais jeter ses idées ou ses personnages aux orties. Ce sont des produits parfaitement recyclables. Un jour viendra peut-être où l’idée ou le caractère laissé en plan viendra alimenter une autre œuvre.

Tout travail doit quand même commencer par l’essentiel et écrire de la fiction n’échappe pas à cette règle de base. D’abord et avant tout, se faire plaisir.

Blogueur

Devenir blogueur est une décision pouvant paraitre simple et elle se prend souvent sans en faire plus de cas. Nous pensons être en mesure de fournir des informations intéressantes à nos lecteurs dans un domaine dans lequel nous sommes compétents ou qui nous fait plaisir, nos loisirs, nos enfants, un sujet d’intérêt ou d’inquiétude, etc.

Grand corbeau

Puis on se lance avec la ferme conviction que les lecteurs afflueront. Normal, si quelque chose nous intéresse, il devrait y en avoir tout un tas avec le désir de nous lire alors que nous possédons d’excellentes informations sur le sujet.

Nos premiers abonnés semblent confirmer notre analyse. Ça va déchirer ! On le sent ! Puis le premier pic d’abonnés s’essouffle. On redouble d’efforts, mais déjà notre esprit commence à comprendre la dure réalité. Peu importent nos énergies déployées, un nobody restera un nobody à moins de faire scandale ou de faire un tabac avec une vidéo totalement conne donc virale.

StatsWP

Bloguer vide notre sac à provisions qu’on croyait pourtant inépuisable. Chaque nouvel article nous coûte davantage que le précédent. Nous espaçons nos écrits, mais nous commençons déjà à sentir la fin de l’aventure. Trop de désavantages pour presque aucun avantage. Le nombre de lecteurs reste famélique pour tout ce temps et tous ces efforts investis… en vain.

Nos écrits resteront accessibles un certain temps jusqu’à ce que l’abonnement au site vienne à échéance et sans renouvellement cette belle aventure finira comme elle a commencé, dans l’anonymat le plus total.

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Cette aventure a été vécue par nombre de personnes aujourd’hui disparues des radars et qui gardent un souvenir mitigé d’espoirs déçus. Il faut toutefois se rendre à l’évidence, nos blogues sont des gouttes d’eau dispersées dans une mer de n’importe quoi, quelques articles sérieux originaux, beaucoup de relais d’informations préexistantes et un tas d’inepties.

Le blogue du Corbot existe depuis plus d’un an, mais j’écris un article par jour depuis une révolution terrestre complète autour du Soleil. Mes écrits sont tous totalement originaux, je me documente, je fouille dans ma mémoire et dans mes livres, je trouve de nouvelles références, j’élabore un plan en choisissant un angle d’attaque particulier et original, je rédige, révise, corrige, catégorise et étiquette avant de mettre en ligne. Tout ce processus prend du temps et énormément d’énergies quotidiennement.

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Tenir un blogue (b-log), un journal (jour-nal), requiert de la discipline et il dépasse le simple désir de parler de soi et de ses intérêts immédiats. Cet acte nous pousse à nous améliorer tant au niveau du fond que de la forme. Cet exercice quotidien m’a donné des idées nouvelles dans un florilège de domaines distincts. J’ai établi d’étonnants ponts interdisciplinaires. J’ai nuancé ma pensée en intégrant encore plus de variables dans mes équations. Je me suis laissé porter par des flots d’idées décousues que j’ai rassemblées en courtepointes étonnamment riches en couleurs et en substances. Et pour toutes ces raisons, je vais continuer à vous proposer des articles, cependant, je ne m’engage plus à maintenir le rythme d’un article original par jour.

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J’aimerais remercier tous mes lecteurs et particulièrement ceux qui déposent des commentaires. Je sais combien ces petits mots exigent encore plus de temps et d’énergies de la part des blogueurs-lecteurs. Je reçois donc chacun d’entre eux comme de précieux cadeaux. Je continuerai aussi de vous lire de façon assidue et de commenter vos articles lorsque je pense apporter une opinion alternative et originale.

Je poursuis donc mon aventure avec vous durant une autre année, pour du meilleur et du moins pire. Alors… à demain.

Les tam-tams du désir

Avez-vous déjà ressenti la transe en entendant des tam-tams ? Une première expérience en ce sens est particulièrement troublante. Cet état différent, modifié de la conscience, ne s’obtient pas seulement avec des substances psychotropes. Elle peut survenir à l’improviste lors de danses en groupe sur de la musique tribale.

Avec le son des tambours, le corps s’anime, danse, cherche l’accompagnement rythmé. Les corps se frottent à l’unisson, faisant involontairement croitre des pulsions sexuelles sous-jacentes particulièrement irrésistibles.

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Les sons frappés, martelés devinrent nos premières musiques. Les sons soufflés s’y sont rajoutés plus tard et plus tard encore, on inventa les sons pincés ou grattés sur des cordes. Le premier volet de la musique humaine, la percussion, reste le plus ancré et personne n’est à l’abri de ses pouvoirs ancestraux.

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À Montréal, des mois d’avril à octobre, les gens se rassemblent les dimanches en matinée pour jouer bongos, congas, djembés et autres drums au pied du Mont-Royal. Cet événement culturel spontané remonte à l’année 1978 et se perpétue depuis sans qu’aucun organisateur ait besoin d’officialiser ces rendez-vous tenus sous le signe du plaisir, de la diversité culturelle et de la musique.

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Ces rassemblements impromptus mais prévisibles, officieux mais permanents, montrent un beau côté des Montréalais et de son caractère cosmopolite pacifiste vibrant à l’unisson. Bien sûr, les effluves denses de rembourrure de sofa abondent, mais sa légalisation atténuera certainement le zèle de certains policiers qui cherchaient parfois à créer des troubles inutiles autour d’un petit commerce de circonstance.

Si vous passez par Montréal en été, ne ratez pas de participer à une jam-session au pied du Mont-Royal. Vous pourrez même fumer votre marie-jeanne en toute quiétude. Une petite sieste et ensuite la vie nocturne trépidante de Montréal vous attendra pour continuer la fête.

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