Allez, Terre, dis-le-moi !

Il existe quelques endroits au monde qui se partagent, s’échangent, se disputent le titre du plus vieux terrain de la Terre.

On a tout d’abord un craton en Afrique du Sud, l’Australie défend aussi chèrement sa vieillesse, tout comme le Groenland qui détenait la palme jusqu’à tout dernièrement avec un prélèvement âgé de 3,8 milliards d’années. Mais récemment, des géologues québécois ont rendu les trois autres pays jaloux.

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Je me souviens lorsque j’étais plus jeune et je croisais ce genre de rochers qui me semblaient bien étranges avec leurs veines ou taches blanchâtres circulant au travers d’une gangue d’un gris neutre, terne, triste, patiné. Instinctivement, je semblais déjà comprendre que cette roche était très vieille. Elle ne possédait à peu près aucun attrait, semblait fatiguée d’exister, elle avait cédé ses trésors primordiaux pour ne garder que l’ennui. Par contre, ce substrat paraissait extrêmement solide, dur, dense, inaltérable, et pourquoi pas éternel !

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Des prélèvements effectués au Nunavik dans le nord du Québec ont révélé un âge jamais atteint par aucun autre caillou sur Terre. Il serait âgé de 4,2 milliards, voire 4,3 milliards d’années alors que l’âge de la planète est estimé à 4,54 milliards d’années. C’est dire comment ces roches furent parmi les premières à apparaitre à la surface et à n’avoir jamais été recyclées ou totalement érodées.

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J’en ai parlé dans d’autres articles, au Québec le sol fait presque totalement partie du Bouclier canadien, une vaste étendue de roc solidaire issu du magma remonté près de la surface puis solidifié par lent refroidissement. C’est essentiellement du granit, une roche plutonique, c’est-à-dire qu’il ne s’est jamais produit d’effusion de lave. Le refroidissement du magma s’est effectué en profondeur, gardant ainsi une forme cristalline à plus haute densité.

Une datation précise et comparative avec les autres sites ailleurs dans le monde reste difficile. Dans le cas des roches du Nunavik, on y est allé avec la désintégration du samarium 146 aujourd’hui entièrement transformé en néodyme 142, un isotope stable.

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Cette découverte confirme quelques hypothèses comme l’âge de la Terre ou une autre suggérant qu’elle était à ses débuts une immense boule en fusion, que les continents ont émergé du magma bien plus tôt qu’imaginé autrefois et que des croûtes toujours visibles ont résisté à toutes les conditions ayant mené à la disparition des autres continents. On peut donc étudier la composition chimique de ces roches maintes fois milliardaires afin de mieux comprendre les origines de la formation de notre globe et les mécanismes naturels qui l’ont alors façonné.

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Étrange qu’un si jeune pays soit si vieux et qu’émergeant tout récemment de la dernière période glaciaire, il laisse maintenant apparaitre son âge vénérable. Nous, habitants de ce lieu, sommes-nous influencés par le sol sous nos pieds ? Percevons-nous sa solidité à toute épreuve ? Nous inspire-t-il son calme, son assurance, sa patience ? J’aimerais croire qu’il en soit ainsi, que nous, humains vivant à sa surface, devenons plus solides et plus sages à son contact. Une force tranquille que rien ne peut faire disparaitre. Une assise maintes fois éprouvée, mais toujours bien ancrée. Est-il possible qu’on devienne de meilleurs humains si l’on vit sur un meilleur sol ? Nous imprègne-t-il de ses qualités intrinsèques ?

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Le meilleur moyen de le savoir serait de lui poser la question. Il est probablement dur… d’oreille, mais je suis certain qu’il pourrait me répondre… à sa façon. Un rare petit séisme de faible amplitude pourrait constituer une bonne façon de me le confirmer.

Allez, Terre, dis-le-moi !

Le silence pour contrer les dérèglements climatiques

Je me souviens, voilà plus de trois décennies maintenant, j’écoutais régulièrement la météo sur une chaine spécialisée de télévision. Le débat sur les récents dérèglements climatiques n’avait pas encore atteint la population. Seuls quelques spécialistes osaient avancer cette éventualité surtout basée sur des appréhensions plutôt que sur des mesures. D’ailleurs, l’expression anglaise global warming a été évoquée pour la première fois par un climatologue dans la revue scientifique Science en 1975.

Soir après soir, je prenais connaissance des données météo constatées durant la journée et des prévisions pour les prochains jours. J’étais consterné de noter le nombre effarant de journées où l’on battait différents records de toutes sortes. Plus haut ou plus bas maximum, plus haut ou plus bas minimum, nombre d’heures d’ensoleillement mensuel, vitesse de pointe des vents, etc. Les météorologues nous répétaient également que rien d’affolant n’était en train de survenir puisque les moyennes des données restaient plus ou moins inchangées.

J’étais sans connaissance! Je me disais qu’ils devaient tous être tarés ou innocents pour déclarer ce genre d’ineptie. On ne peut pas constamment battre des records sans que rien d’important soit en train de survenir. Prenons un objet simple, une balançoire dans un parc. On connait sa position au repos qui correspond également à sa position moyenne lorsqu’elle se balance. La force de l’élan ne change pas cette position moyenne. On peut donc croire que rien d’important ne se produira, peu importe la poussée appliquée à la balançoire, puisque sa position moyenne reste identique. Et pourtant, on sait tous pertinemment que c’est faux puisque les positions extrêmes atteintes par la balançoire deviendront de plus en plus critiques avec l’ampleur de la poussée. Et finalement, elle cessera de balancer pour décrocher de sa trajectoire pendulaire. Le pendule s’est déréglé.

Pourtant, les météorologues persistaient dans leurs déclarations. Avaient-elles pour but d’éviter la panique dans la population? Si c’était le cas, ils ont parfaitement réussi puisque aucune panique n’est survenue, mais aucun plan d’action pour renverser la tendance n’a émergé de ces années d’indolence jusqu’à aujourd’hui.

Ils auraient mieux fait de nous alerter et même de nous alarmer. Mais un météorologue n’est pas nécessairement un climatologue. Comprendre les cycles moyens et longs des températures ainsi que leurs causes afin de les prévoir n’entrent pas dans les attributions de ceux qui doivent nous livrer leurs prévisions pour les prochains jours, et au mieux les tendances probables pour la prochaine saison.

Sans totalement les blâmer, je ne les excuse pas pour autant. Si les dérèglements du climat ne faisaient pas partie de leurs champs de compétence, l’analogie avec la balançoire aurait dû les interpeller. À partir de ce point, ils auraient pu en référer à des autorités compétentes. Leur silence coupable a engendré une nonchalance toujours présente, puisque les dérèglements climatiques ne font pas encore partie de nos plus grandes préoccupations et ils le devraient depuis plusieurs dizaines d’années maintenant. La tendance actuelle aurait pu être renversée bien plus tôt.

Plusieurs climatologues croient de toute façon que cette balançoire est maintenant trop déréglée pour l’empêcher de décrocher. Les concentrations de CO2 et de CHactuelles engendrent des hausses de température suffisamment importantes pour permettre la libération accélérée de ces mêmes gaz actuellement piégés dans les pergélisols et les fonds océaniques. On appelle ce phénomène un emballement thermique puisque la hausse des températures engendre une hausse encore plus grande des températures et aucun autre phénomène naturel n’est suffisamment important pour contrer cette boucle réactive fatale.

La pensée magique anime les politiciens du monde entier. Placer un bandeau sur ses yeux ne fait pas disparaitre la Lune, pourquoi le ferait-il avec les changements climatiques? Le silence déployé comme solution nous mènera tout droit à des temps de grande noirceur.

La vérité, aussi dure et laide soit-elle, ne causera jamais autant de torts que son ablation. Mais certains croient encore qu’il faut tempérer les états d’âme des citoyens pour préserver la paix sociale. Dans un certain sens, ils n’ont pas tort, car quoi de plus pacifique qu’une humanité entièrement disparue?

Expressions québécoises – 1,5

Comment 1,5 ? Après 1, c’est 2, il me semble. Oui, si on compte sans les fractions. Mais j’ai voulu donner suite à la tuque attachée avec de la broche, car un lien les unit. Je le mentionnais dans la rubrique n° 1, une tuque possède souvent un pompon et voilà pourquoi j’associe les deux expressions, car…

L’expression est : « Se calmer le pompon », « Calme-toi le pompon ! ».

Sa signification est : « Garde la tête froide », « Respire par le nez », « Baisse d’un cran (ou de plusieurs) ».

Lorsqu’on se promène avec une tuque à pompon sur la tête, ce qui est fréquent par chez nous à cause du froid omniprésent 6 mois sur 12, cet appendice est particulièrement visible. Et si la personne porteuse d’une tuque à pompon s’énerve, celui-ci branlera dans tous les sens, signe apparent de son état.

On utilise cette expression uniquement lors de circonstances qui ne sont pas tragiques, puisque c’est une façon humoristique de dédramatiser une situation qui ne le mérite pas nécessairement.

On ne l’utilise pas plus avec des inconnus, puisque ça demande un certain niveau de complicité. Si celui-ci dépasse les bornes, on voudra chercher à le calmer et cette expression risque d’attiser son agressivité en laissant paraitre futiles ou inexistantes les raisons de sa colère.

Elle s’utilise lorsqu’un lien d’autorité existe, comme un parent à son enfant. La formule fait moins outrageante, mais pas moins sérieuse.

En amitié, c’est un bon moyen de signifier qu’il serait temps de changer de ton, sans égard aux causes entrainant la valse musette du grelot attaché au sommet de sa tuque virtuelle.

Donc, si vous constatez que je pète les plombs dans un de mes articles, vous seriez en droit de le commenter en m’écrivant « LeCorbot, calme-toi le pompon ! »