Zénitude et sacrifice

Je n’utilise pas un néologisme, zénitude fait bien partie du dictionnaire. Ce mot se comprend sans vraiment devoir l’expliquer, un mariage évident entre zen et plénitude.

D’entrée de jeu, la zénitude ne m’habite pas. Au mieux, j’ai appris à relativiser les situations difficiles et les émotions qu’elles me provoquent. Pour être plus précis, je ne colle plus au plafond à chacune de mes frustrations relatives aux humains ou à leurs moindres imbécillités volontaires. Si la zénitude et moi étions parents, elle serait la grand-mère de la tante de la fesse gauche de l’arrière-petit-fils du cousin germain de mon beau-frère. Vous voyez tout de suite le lien de parenté étroit qui nous unit.

zen-accueil

Pourquoi la zénitude n’a-t-elle pas élu domicile chez moi ? Probablement parce que je reste extrêmement sensible à plusieurs facteurs dont la liste qui suit n’est sûrement pas exhaustive. Comme les radis, je tolère très mal la bêtise humaine, le mensonge qui accompagne toujours la bêtise humaine, l’égoïsme qui accompagne toujours le mensonge, la mauvaise foi qui accompagne toujours l’égoïsme et enfin la cupidité qui accompagne toujours la bêtise humaine, le mensonge, l’égoïsme ainsi que la mauvaise foi.

7a0ba552

J’ai compris que la zénitude m’obligerait à faire comme les trois singes, me fermer les yeux, les oreilles et la bouche. Être dans un camp de concentration, c’est-à-dire en mode survie totale, j’y parviendrais, parce que la situation m’y obligerait. Mais de mon plein gré et pour les affaires de la vie courante, la zénitude serait pour moi la pire des prisons.

s6sh8tbo

Je veux tout voir, tout entendre, tout comprendre et tout commenter. Je veux me faire une opinion sur tout ce qui s’approche de moi, je veux l’émettre et être en mesure de la défendre. Je veux parler des abuseurs de tout acabit. Je veux délier les écheveaux trop emmêlés qu’ils semblent inextricables et jeter les fils démêlés à la face de ceux qui se croyaient plus fins en concevant ce motton compact. Je veux prendre le parti de ceux qui risquent d’être victimes de ces gens. Je veux mettre leurs vils desseins sous les projecteurs pour que l’ombre ne puisse plus les camoufler.

c4rd4r7_x5Qt64jrzu

Tout ceci me parait bien incompatible avec la zénitude. Je ne vivrai probablement pas aussi vieux, mais chaque petite victoire de la lumière sur les forces de l’ombre me comble de joie, une joie qui mérite qu’on y sacrifie plusieurs années… de zénitude.

Les quatre D

La nouvelle façon de vivre, c’est de mentir impunément. Puisque personne n’est sanctionné, le mensonge devient ainsi la norme sociale. Mentir en niant même les pires évidences, en affirmant exactement le contraire de ce qu’on fait, en jetant les blâmes des conséquences de ses actes sur ses adversaires, en inventant n’importe quels faux événements pour convaincre les autres de se rallier à sa cause, en menaçant les dénonciateurs. Mentir est même devenu tout à fait acceptable. Le mensonge prouve que vous prenez tous les moyens pour gagner et les gens aiment ceux qui gagnent, peu importe comment ils y parviennent.

Autrefois utilisé avec parcimonie puisque se faire prendre à mentir coûtait presque toujours sa carrière, aujourd’hui les menteurs ne cachent même plus. Sachant pertinemment qu’une partie des auditeurs ne sont pas dupes, ils s’en foutent totalement puisqu’ils ne font face à aucune conséquence.

trump-scouts-jamboree

Mentir permet à ses disciples et admirateurs de reprendre ces aberrations à leur compte et de les semer à tout vent. Lorsque des milliers de personnes crient un même mensonge sur tous les médias sociaux, le mensonge prend des allures de vérité. Surtout que personne (ou presque) ne s’intéresse à faire contrepoids.

Les menteurs imposent leurs règles, car aucune logique ne peut venir à bout des mensonges. La logique doit donc céder le pas à quelque chose de plus puissant et de plus draconien. Mais qui maintenant voudra mettre en place un système qui botterait le derrière aux mythomanes compulsifs lorsqu’ils sont au pouvoir ? Et ce sont des gens comme vous et moi qui les avons placés à ces postes. Vous, moi et aussi d’autres menteurs payés pour falsifier les résultats.

Voilà quelle société nous avons créée et dans laquelle nous vivons actuellement. Une société qu’il sera bien difficile de se défaire… à moins de devenir nous aussi des menteurs invétérés afin de combattre à armes égales. Mais alors, qu’est-ce qui aura changé sinon un nom sur une plaque et dans des documents ?

Une société ayant érigé le mensonge en système sera obligée d’endurer ce mode jusqu’aux quatre D, car cette abominable tolérance est le signe évident de la décadence d’un peuple qui entraine son déclin, engendre sa déchéance et enfin apporte sa destruction.

 

« Tu es la plus belle ! »

Quelle femme ne désire pas entendre ces mots de la bouche d’un amoureux? Pourtant, ils sont lourds de conséquences pour vous, mesdames.

J’ai connu deux relations amoureuses durant lesquelles les femmes étaient jalouses. Ce défaut étant absent chez moi, ce sentiment s’avère difficile à comprendre sur le coup et ses motifs, motivations et mécanismes sous-jacents restent nébuleux. J’ai simplement constaté un empoisonnement constant et croissant de mes deux relations sans que je puisse y faire grand-chose.

shutterstock_114489376_1

Lorsqu’un homme ose déclarer à une femme qu’elle est la plus belle, c’est un mélange de vérité et de sentiments personnels indéfinissables. J’oublie les frimeurs, les menteurs, les manipulateurs qui ne se gênent aucunement à utiliser cette phrase comme un papier collant. Je parle des hommes qui le pensent sincèrement, et ce malgré l’extrême formule utilisée.

Lorsqu’un homme se déclare de la sorte, il ne veut aucunement dire qu’il ne vous trouve aucun défaut physique ou psychologique, ni même que vous êtes la reine de beauté de tout l’Univers. Il devient donc inutile de lui dresser une liste des défauts que la femme se reconnait.ventre-cuisses-fesses-les-francais-sont-complexes.jpeg

«Mon ventre n’est pas plat, mes seins tombent trop à mon goût, j’ai des vergetures, de la cellulite, une tignasse, des grains de beauté mal situés, le gras des bras mous, les gros orteils déviés, un nez aquilin, de trop grosses fesses» et tutti quanti.

couple-mains.jpg

Que croyez-vous, mesdames? Qu’il n’avait rien vu de tout cela? Vous croyez vraiment qu’il est aveugle ou imbécile? Quand un homme déclare que vous êtes la plus jolie, il inclut tous vos propres reproches dans son appréciation. Il dit pourtant la vérité, car selon l’homme, la beauté féminine comporte bien plus qu’une simple facette, votre beauté se situe au-delà d’une appréciation physique cruelle. Pourtant, combien d’entre vous croient le contraire

Pour en arriver à ce constat bien personnel, il vous a comparé à d’autres femmes qui n’ont pas fait le poids lorsqu’il a tout mis les aspects de la beauté dans la balance. Mais pour avoir comparé, il a observé d’autres femmes. Et c’est seulement parce qu’il a comparé qu’il peut déclarer sincèrement que «vous êtes LA plus belle». Sans comparaison, vous ne pouvez pas être mieux que simplement « belle ».

cils.jpg

Regarder sans concupiscence d’autres femmes est normal. Il voit sa compagne, il voit aussi les autres femmes et les aguicheuses ne peuvent nier leur pouvoir en ce sens. Ce processus permet au bout du compte de déclarer sans mentir que «vous êtes la plus jolie». Celles qui reprochent à leur amoureux certains regards en direction de la gent féminine les privent du moyen essentiel permettant de leur dire avec le plus grand sérieux du monde qu’elles sont à leurs yeux la plus belle de toutes les femmes.

Elles risquent en revanche de transformer ses simples regards en œillades, ses compliments en mensonges et ses projets d’avenir en issues de secours. La jalousie injustifiée constitue d’abord et avant tout une injustice et l’homme est conçu pour fortement y réagir.

La jalousie n’a jamais empêché l’infidélité, au contraire elle l’attise. Bien peu d’hommes trouvent la jalousie sexy, de bon goût ou adéquate. Le plaisir de se sentir désiré cède rapidement devant les désagréables conséquences d’une jalousie constante.

Je-suis-jalouse-de-la-reussite-d-un-proche-c-est-normal_width1024.jpg

De plus, elle privera la femme du plus beau cadeau qu’un homme puisse faire à une femme, lui dire de manière honnête et amoureuse: «Tu es la plus belle».

Pour celles qui possèdent de bonnes raisons de douter de la fidélité de leur compagnon, encore une fois la jalousie ne règle rien. Le contrôler par ce moyen ou par un autre échouera lamentablement. En contrepartie, les femmes gardent le contrôle de leurs propres pensées, décisions et actes.

Quitter un homme affublé d’un défaut impossible à tolérer reste la meilleure des solutions. Accepter son défaut reste un choix difficile, voire impossible, mais un meilleur choix tout de même que de tomber dans la jalousie lorsque la séparation est écartée de l’équation. Passer un pacte librement et mutuellement consenti n’aura de sens que si les termes sont clairs et réalistes.

jalousie.jpg

Lorsqu’un homme déclare à une femme jalouse qu’elle est la plus belle, vous pouvez être assurés qu’il ment. On doit plutôt y comprendre: «Ce compliment va-t-il calmer tes sangs?»

3566.jpg

Si déclarer sincèrement à une femme qu’elle est la plus belle revient à l’homme, il revient à la femme de faire en sorte qu’il se sente honnête lorsque viendra le temps de le répéter.

Juger ou tolérer ?

Juger quelqu’un, c’est être un juge avec son code d’éthique personnel qui n’a rien d’universel ni d’éprouvé. Alors faut-il juger ou tolérer ? Juger semble un geste inapproprié et tolérer une vertu. J’ai une tout autre opinion sur le sujet.

Juger est très acceptable tant que ça nous concerne. Transmettre nos jugements à des tiers, voilà ce qui constitue la faute. Personnellement, je me donne le droit de juger qui je veux et de choisir en conséquence mes amis et mes connaissances, mais je réserve mes opinions pour moi seul. Même la personne concernée ne le saura pas si elle ne me demande pas mon opinion sur elle, sur ses agissements.

La tolérance est un mot que je garde sous très haute surveillance, parce qu’elle nous laisse croire que nous sommes un mauvais individu lorsqu’on se sent intolérant face à quelqu’un et c’est un piège. Un piège qui, heureusement, se contourne.

Je préfère garder mon niveau de tolérance actuel, mais rester coi. Je réserve mon opinion. Je fais des choix sans essayer d’attirer à moi la sympathie à mes causes, à mes idées, à mes opinions. Si je sens devoir quitter un groupe pour rester neutre en actes, je le fais sans aucun problème. Je choisis donc je juge donc je choisis.

En se donnant le droit de juger et de choisir, on s’évite toutes sortes de malaises entre notre moi et notre surmoi. Mais n’essayez pas de me tirer les vers du nez. Cette solution retire de l’équation toute l’hypocrisie que l’on ressent lorsqu’on juge, mais qu’on se dit que ce n’est pas bien, tout en sachant qu’on ne fera ni pensera pas autrement.

La solution est donc définie dans l’adage « Le silence est d’or ». Comme quoi les vieilleries ne sont pas nécessairement dépassées. Mais serez-vous capable de vous taire ou de vous éloigner ? Voilà pourquoi la tolérance existe, mais elle reste une solution de rechange, un plan B, comportant des conséquences importantes pour celui qui se prétend tolérant.

L’estime de soi ne nous rend pas plus tolérants, elle nous rend moins bavards.

Photo : e-ostadelahi.fr