Usurpation de plume

Lu dans un blogue : « Dieu est fidèle à ses promesses ». Ouf ! Quelle affirmation lourde de conséquences ! En théorie, puisqu’il est censé avoir tout créé, ses promesses sont la façon dont le monde fonctionne dans ce qu’il a de plus élégant, mais aussi dans ce qu’il a de plus cruel et hideux.

Winter’s Tale

Cependant, il faut se le dire, cette citation ne provient évidemment pas d’un quelconque dieu, mais seulement d’un disciple un peu trop enthousiaste qui écrit et signe en son nom et sans sa permission par-dessus le marché. De toute façon, est-ce que ce dieu lui-même entérinerait la paternité de la liste entière de ses prétendues promesses qu’on lui attribues ?

D’autre part, si on y pense sérieusement, ce dieu serait fidèle à ses promesses de façon distincte, pas pour tous ses enfants de façon égale. Il aurait des préférés avec lesquels il remplirait ses promesses tandis qu’il les renierait pour d’autres gens qu’il balancerait aux fauves, indistinctement qu’ils soient croyants, pieux ou non.

En supposant que je crois en un dieu, la seule promesse que j’accepterais de lui attribuer une quelconque paternité, est celle qu’on finira tous par crever. Au moins, ça, c’est une vérité qu’il aurait pu nous promettre et dont, effectivement, il tiendrait parole envers tous ses sujets, bêtes et humains, pauvres et riches, croyants et impies.

Lorsque je franchirai le seuil de ma demeure éternelle, en supposant qu’elle soit dans un quelconque condo-paradis géré par dieu, j’aurai bien le temps de lui arracher cette fameuse liste. Si elle contient plus que le seul item dont je viens de mentionner, soit la mort assurée pour tous, j’aurai alors de mon côté une liste infinie de griefs à lui remettre pour manquement flagrant à ses promesses.

Et si cette liste de promesses ne concerne pas notre vie terrestre, elle ne concerne pas ma vie. Le fait de me faire dire ici-bas qu’il honorera ses promesses valables seulement dans l’au-delà reste une promesse hautement hypothétique que rien ne peut prouver. Ce n’est évidemment qu’une promesse d’un humain et non d’un dieu. Et je me méfie de tous les humains qui écrivent et signent au nom d’un autre individu sans sa permission.

Je paraphraserai Niels Bohr lorsqu’il répondait à Albert Einstein lorsque ce dernier affirmait avec conviction que « Dieu ne joue pas aux dés. »

« Cessez de dire à Dieu ce qu’il est censé faire. », lui répondit le physicien Danois.

Cette phrase concerne également tous ces disciples qui s’arrogent le droit d’écrire ce que Dieu est supposé penser et faire.

Coucher des mots dans un cahier appartenant à quiconque autre que soi-même ne peut qu’être répréhensible. Tout le monde devrait clairement exprimer qu’ils ne sont que des opinions personnelles et rien de plus. Les convictions les plus profondes ne doivent jamais être confondues avec la vérité et encore moins si celle-ci est censée être céleste. Toute personne tentant de convaincre du contraire est à répudier le plus rapidement possible. Ces phrases fracassantes doivent être reconnues comme les relents de manipulations issues d’humains contre d’autres humains.

Pour un écrivain, les droits d’auteurs sont sacrés et l’usurpation d’identité de plume, une félonie et une trahison. Je pense que tous les dieux seront de mon avis, mais je n’irai pas jusqu’à l’affirmer en leur nom.

Verra-t-on un trou noir… un jour ?

Les images dans cet article sont des vues d’artistes ou des images de synthèse

En 2018, j’ai écrit une série d’articles (1 ; 2 ; 3 ; 4) sur l’éventualité d’admirer pour la première fois l’image réelle d’un trou noir avant la fin de cette année-là. À l’évidence, ceux qui avaient pris ce pari, l’équipe de l’EHT (Event Horizon Telescope), ont péché par un trop grand optimisme.

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Plus de trois mois après leur seconde échéance, aucune nouvelle n’a encore filtré sur leur site web, la dernière mise à jour remontant au 8 août 2018. En octobre 2018, la revue universetoday.com abordait ce sujet et rappelait à leurs lecteurs que rien n’avait été annoncé par l’équipe de l’EHT après l’échéance d’avril 2017.

Je ne veux pas discuter de leurs difficultés techniques, des temps réduits sur les télescopes et de tous les problèmes qu’ils ont dû affronter et qui continuent de jalonner leurs travaux pour composer cette fameuse image. Personne ne met en doute les immenses défis qu’a à relever l’équipe de l’EHT pour traiter les données accumulées en 2017.

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Je veux juste parler de cette tendance de plus en plus répandue à vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué, à promettre sans sérieusement évaluer l’ampleur réelle du défi, à titiller l’intérêt des gens pour ensuite se rendre compte que ça ne pourra pas se faire dans les temps, à pérorer plutôt que penser.

Je ne suis pas contre l’enthousiasme, bien au contraire, mais je suis également très attaché au sérieux d’une démarche d’engagement. Promettre de réaliser quelque chose et s’en tenir ne semble plus représenter aucune importance, alors on promet sans compter puisque les conséquences de rater la cible semblent nulles.

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J’aurais pu choisir une autre victime que l’équipe de l’EHT, ce ne sont pas les exemples qui manquent. Je l’ai choisie parce que le sujet est éminemment important pour la cosmologie et sa théorie dominante, la relativité générale d’Einstein.

Euh, oui, bon! En cherchant bien, on peut trouver quelques sujets plus importants dans la vie, j’en conviens. Qu’importe, car tout ce qui a semblé trop éloigné du quotidien pour avoir la moindre importance dans nos vies a fini par l’envahir d’aplomb! Et la relativité générale n’y fait pas exception. Si vous l’ignoriez, à chaque utilisation d’une appli de positionnement par GPS, la relativité générale vient à la rescousse pour assurer la précision des calculs. Sans elle, les positions dériveraient de plusieurs mètres par jour.

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Ce serait donc une erreur de penser que la cosmologie n’a d’intérêt que pour ceux qui l’étudient. La cosmologie est près de nous et même en nous. Le destin de l’Univers dépend de tout ce qu’il contient, nous y compris.

Les trous noirs pavent la voie vers une compréhension inédite de notre Monde, car ils relient la physique relativiste et la physique quantique. Ce sont des objets très simples et pourtant prodigieux.

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Cette fameuse et toujours absente première image véritable du trou noir supermassif réfugié au cœur de notre Galaxie apporterait la preuve définitive que ce type d’aberration naturelle existe bel et bien, et pas seulement dans les livres de physique. En revanche, si l’image diffère de ce que nos simulations numériques nous montrent, nous pourrions mettre la main sur quelque chose d’extrêmement important, un indice d’une nouvelle physique.

Alors, de grâce, chère équipe de l’EHT, cesse de promettre la Lune ou le Trou noir et redouble plutôt d’ardeur au travail! Je déteste écrire des titres d’articles à la forme interrogative et ensuite devoir répondre «non». «Verra-t-on un trou noir en 2018?» C’était le titre de ma série d’articles concernant ton travail en cours… alors, cours!

Des promesses !

Lu dans un blogue: «Dieu est fidèle à ses promesses». Ouf! Quelle affirmation lourde de conséquences! En théorie, puisque l’Univers entier est la création de Dieu, la fidélité à ses promesses signifie la façon dont le monde fonctionne dans ce qu’il a de plus élégant, mais aussi dans ce qu’il a de plus hideux et cruel.

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Cependant, cette citation ne provient pas d’un quelconque dieu, mais seulement d’un disciple un peu trop enthousiaste qui écrit et signe en son nom sans sa permission. Dieu entérinerait-il la paternité de la liste des prétendues promesses que certains humains lui attribuent?

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D’autre part, Dieu remplirait ses promesses de façon inégale. Certaines personnes obtiendraient ses préférences alors qu’il renierait ses promesses sans aucune vergogne envers d’autres de ses créatures, et ce indistinctement qu’ils soient croyants ou athées, pieux ou indifférents, vertueux ou bandits.

En supposant que je crois en un quelconque dieu, je serais prêt à lui attribuer la paternité d’une seule promesse, celle qu’on finira tous par crever. Au moins, voilà une vérité qu’il aurait pu nous promettre et à laquelle il tiendrait effectivement parole envers tous ses sujets, bêtes et humains, dévots et impies.

Niels Bohr répondait à Albert Einstein: «Cessez de dire à Dieu ce qu’il est censé faire» quand ce dernier affirmait que «Dieu ne joue pas aux dés».

Cette phrase devrait également concerner tous les disciples de quelconques religions ou sectes qui s’attribuent le droit d’écrire ce que Dieu est censé penser, faire et promettre. Ils pourraient se contenter de se rappeler les promesses qu’eux ont fait à leur Dieu. Ce serait déjà beaucoup.

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Certains ont peut-être besoin de croire en un Dieu récompensant ou vengeur pour décider de faire le bien plutôt que le mal autour d’eux. Pourtant, il suffit de remplir les cœurs de bonheurs autour de soi et la récompense absolue survient immédiatement. Nul besoin d’attendre une prétendue promesse à survenir dans l’au-delà pour atteindre l’extase.

Les promesses impériales

Tous les empires se créent et se développent autour de promesses faites aux gens qu’ils désirent intégrer, enrôler, embrigader. Parfois, pas très souvent, les promesses restaient modestes, réalistes et tenues durant longtemps. D’autres ne furent qu’un tissu de mensonges rapidement consumé, des étoiles filantes. La plupart des empires ont entretenu des illusions par l’usage de croyances religieuses d’autant plus indiscutables qu’elles étaient imbéciles. Les promesses attirent les esprits et les religions les incarcèrent.

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Aujourd’hui, ce processus demeure valide et les deux garanties essentielles données par les empires à leurs citoyens n’ont pas changé. Sécurité et prospérité sont les deux mamelles impériales primordiales auxquelles s’abreuve le peuple captivé, mais captif.

Pour respecter la seconde promesse faite à leurs citoyens, celle de la prospérité, les empires ont besoin de s’étendre. Pour l’obtenir, les guerres représentent le moyen privilégié de toujours. Cependant, elles fragilisent la promesse de sécurité, puisqu’elles créent de nombreux ennemis prêts à tout pour récupérer les spoliations.

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Ainsi, les empires transportent les germes de leur propre fatalité en se bâtissant sur deux oppositions irréconciliables. Voilà pourquoi tous les empires ont fini et finiront par mourir malgré leur puissance et leur hégémonie. L’illusion pourra durer, elle ne persistera jamais.

L’histoire neutre met en lumière ces lentes descentes, celles des Grecs, des Romains, des Mongols, des Teotihuacanais, des Espagnols, des Français, des Anglais, des Japonais, des États-Uniens, etc. et elles se ressemblent toutes plus ou moins. Elles sont dues aux dilutions des forces, parfois retardées par des moyens technologiques supérieurs à ceux des adversaires, mais jamais entièrement suffisants pour éviter l’affaiblissement systémique.

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Mais si les empires titubent bien avant leur chute, le coup de grâce a souvent été assené par une cause non humaine. Dans bien des cas, ce fut l’œuvre d’une catastrophe naturelle qui a brisé définitivement certaines promesses impériales et par conséquent la confiance du peuple envers leur protecteur.

Volcanisme, séismes, météorisme et inondations ont apporté destructions globales, famines, maladies épidémiques, périodes prolongées de gel, invasions d’insectes, déchirures du tissu social et déchéances. L’histoire est remplie de ces corrélations entre disparitions d’empires et cataclysmes puisque l’illusion de sécurité nourrie par l’apaisement des dieux ne persiste toujours qu’un certain temps. La Nature agit sans notre consentement, sans se préoccuper de nos prières ni de nos implorations.

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Aujourd’hui, rien n’a changé et les empires actuels sont en voie d’être remplacés par d’autres plus primitifs encore, faisant miroiter les mêmes idioties séculaires.

La durée d’une vie humaine est passablement courte, c’est bien connu. Les empires resteront donc toujours attractifs, car les gens pensent pour les prochaines dizaines d’années, jamais bien au-delà. Alors, vaut-il mieux croire aux avantages des empires ou non? Les empires ne représentent que des trains, pas des destinations. Simplement, ne pas se bercer de leurs illusions et s’estimer chanceux si leur destruction ne survient qu’après notre mort, cette seule et vraie destination.

Je t’aimerai toujours

Vous rappelez-vous du premier « je t’aime » ? Vous l’avez probablement pensé très fort durant un certain temps avant de le lui avouer. Ce tout premier « je t’aime » a été une étape difficile à franchir. Vous auriez préféré l’entendre de la bouche de votre chéri(e) plutôt que de vous mettre à nu en premier. Mais lorsque vous souffriez trop de vous taire, vous avez fini par traverser le Rubicon dans un moment de… faiblesse ou d’intenses émotions. Au début, vous le déguisiez parfois en slogan, en rigolade ou en chuchotement pour ne pas trop en dévoiler du coup. Le temps passant, « je t’aime » devint plus naturel, plus fréquent et plus normal. Puis un jour, vous avez eu la désagréable impression qu’il était devenu anodin. Il avait perdu de sa superbe et de sa magie des premiers temps.

Par dichotomie, votre amour a continué de croitre et vos « je t’aime » sont restés identiques. Vous vous êtes retrouvé au point de départ, à la recherche de mots nouveaux pour exprimer avec justesse l’intensité de vos sentiments. Tout à coup, une idée folle traverse votre esprit. Sans les avoir sciemment choisies, quelques lettres deviennent une éventuelle déclaration, mais vous vous gardez de les lui dire. C’est trop gros, trop tôt et encore trop incertain.

Pourtant, à l’instar du ruisseau cherchant la mer, l’idée se fraie lentement un chemin parmi les obstacles de la quotidienneté. Vous scandez la phrase lorsque vous êtes seul, craignant puérilement de l’oublier si elle reste muette. Vous ressentez intensément son grand pouvoir qui vous fait aussi craindre de mourir avant d’avoir osé la lui révéler. Vous tentez de vous calmer, de réfléchir, de cogiter en constatant soudain que la distance entre « je t’aime » et « je t’aimerai toujours » se mesure en années-lumière. Puis un jour, par hasard, survient un événement distinctif et vous franchissez la mer des doutes pour la toute dernière fois.

Car plus jamais d’autres mots n’exprimeront votre amour avec une plus grande intensité. Tout aura été dit et entendu ou lu, car la plume sait se faire entendre même en chuchotant à travers le brouhaha de l’effervescence des vies modernes. Elle sait également répéter le message sans jamais se lasser. Elle sait même transformer une déclaration en poème, un mot en fleur et une phrase en arc-en-ciel.

« Je t’aimerai toujours » n’est pas un cadeau à donner ni un vœu à exprimer, c’est un serment, une promesse solennelle. C’est pourquoi cette déclaration irrite tellement lorsque votre cœur s’est insuffisamment préparé. Vos paroles sortent, acide, de vos commissures et se répandent en bave irritante ou en écume mensongère.

Comme le brin d’herbe, vous ne pouvez tirer sur vos sentiments pour les faire croitre plus rapidement. Il est fort possible que votre amour n’atteigne jamais son apex. C’est peut-être mieux ainsi, car comme tout don, celui de l’amour absolu se paye à prix fort.

À moins d’une situation exceptionnelle, vous déclarerez cette courte phrase de quatre mots à une seule personne dans votre existence (excluant vos enfants) et chaque fois votre cœur se resserrera et cessera de battre durant une infinie seconde. C’est pourquoi cette déclaration ne deviendra jamais banale ni euphémique.

Malheureusement, même les professions de foi les plus sérieuses et les plus engagées risquent de mourir précocement. Vous pourrez accuser le manque de réciprocité, les changements de conditions imprévus ou tout autre dérangement susceptible d’excuser votre récusation. Cette affirmation absolutiste serait-elle alors vouée à n’être rien de mieux qu’une promesse d’insensé ?

Comme tous les superlatifs, « je t’aimerai toujours » ne peut souffrir d’aucun fléchissement sinon il s’amenuise et disparait dans le brouillard des amours trahies. Auraient-elles alors simplement existé ? Et pourtant, subsistent quelques-unes de ces promesses contre temps et mortalités. Votre dernier souffle sera-t-il voué à renouveler votre serment Unique ? Alors que vous fuyez vers le crépuscule, que les dernières secondes s’égrènent, tous vos doutes enfin disparaitront lorsque vos dernières paroles prononcées seront « je t’aimerai toujours ».

Lire la suite « Je t’aimerai toujours »