Les religions aimaient bien récupérer les fêtes païennes afin de mieux faire passer les transitions d’un mode de croyance à un autre. C’est ce qui s’est produit avec Noël, la célébration de la Nativité. En situant cet événement le 25 décembre, la chrétienté l’amalgamait à la célébration païenne du solstice d’hiver. Petit à petit, le Soleil cessa d’être le centre d’intérêt au profit de la naissance du Christ.
Par la suite, Noël goûta à cette même médecine en perdant son sens religieux au profit d’une fête presque essentiellement commerciale centrée autour d’un personnage fabuleux et fantasmagorique, le père Noël.

Afin de conserver un certain sens du sacré, beaucoup d’efforts ont été effectués pour ramener certaines valeurs morales à l’avant-scène. Au-delà d’un événement religieux, la charité, le partage, le pardon, l’amour et la générosité sont toutes des valeurs qu’aujourd’hui Noël évoque avec fortes insistances.
Ainsi, nous pouvons rendre hommage à ces valeurs universelles, qu’on soit de confession chrétienne ou pas. La « magie » de Noël transforme les gens, ne serait-ce que l’espace d’un instant. Les pingres se voient subitement dotés d’un cœur généreux, les acariâtres deviennent tolérants, les ermites accueillent le voisinage et les menteurs cessent de dire n’importe quoi.

Bien sûr, toute cette bonté ne perdure pas et dès la fête terminée, ce beau monde retourne à ses activités favorites jusqu’au… prochain miracle de Noël.
Une seule journée de bonté dans toute une année, je ne vois pas l’intérêt de fêter victoire. Ce n’est ni plus ni moins qu’un cadeau empoisonné. Noël nous laisse croire que les choses peuvent devenir différentes alors qu’il n’en est rien. Le monde continue d’être égoïste, ambitieux, narcissique, cruel, radin, violent et insensible.
Alors pourquoi devrais-je fêter Noël ? Vous dites que c’est la fête de l’espoir ? Mais pour moi, l’espoir nourrit l’inaction. Si on veut que le monde change vraiment, celui-ci doit cesser de célébrer l’espoir, de recevoir sa dose d’idées soporifiques une fois par année.

Comme par les années passées, cette nuit, je ne célébrerai pas Noël. Je me coucherai tôt et je rêverai plutôt que le monde change vraiment. Ce ne sera qu’un fantasme, direz-vous ! Oui, c’est vrai. Mais je ne me bercerai pas d’illusions, contrairement à ceux qui croient en étant réveillés que Noël changera quelque chose dans leur vie alors que le seul vrai miracle serait qu’eux-mêmes deviennent réellement différents.

