
De tous les oiseaux évoluant à nos latitudes intermédiaires, certains présentent une beauté touchante. J’élimine volontairement le corbeau de cette liste par souci d’équité envers les autres représentants de cette classe d’animaux dite « Aves ».
Bien que le canard branchu, le chardonneret, le cardinal, le geai bleu, l’oriole de Baltimore, le harfang ou la mésange charbonnière soient des plus spectaculaires, que dire du faucon pèlerin ?

Ici où je vis, niche actuellement un oiseau au sommet de la tour de l’Université de Montréal. Bien que les doigts soient habitués à se délier pour traiter de son apparence générale passablement suggestive, en ce moment, le principal sujet de discussions est cette femelle faucon couvant quatre œufs de couleurs brun et beige. Les nuances de couleurs arborées par ce spécimen m’éblouissent.
Je dois avouer que le bleu s’avère être ma couleur favorite. Non, contrairement à ce que vous pourriez penser, ma couleur préférée, moi, LeCorbot, ce n’est pas le noir, car celle-ci n’est pas une couleur, mais une « absence de couleur ». Pour preuve, mettez des cartons de toutes les couleurs dans une pièce privée de lumière et ils apparaitront tous identiques, c’est-à-dire noirs. Le noir est ce qui reste lorsqu’on a retiré toutes les couleurs.
Vous pouvez admirer cet oiseau et ses comportements en direct sur YouTube. https://youtu.be/ex996QexEfQ
Le premier œuf a été expulsé le 16 avril et le quatrième le 23 avril 2023, donnant une moyenne d’environ 54 heures entre les pontes. La boite de bois a spécialement été conçue pour recevoir l’oiseau qui n’en est pas à sa première année à cet endroit. La première éclosion est prévue pour le 23 mai. D’ici là, l’oiseau devra se nourrir occasionnellement. Ses proies sont les autres oiseaux, y compris les corbeaux, qu’il attaque le plus souvent en piqué. On le dit l’oiseau pouvant atteindre la plus grande vitesse au monde, plus de 400 km/h. Ses proies sont assommées sur le coup et il utilise son bec pour briser les vertèbres cervicales de ceux qui ont réussi à vivre à l’impact de la collision.
La femelle est de taille plus importante que le mâle, une cinquantaine de centimètres pour elle et une quarantaine pour lui. L’envergure dépasse parfois le mètre. Quant au poids, il varie de 600 g pour les petits mâles à 1 300 g pour les grosses femelles.
Étrangement, au Québec, on le retrouve uniquement dans deux petites bandes aux extrémités nord et sud de la province. À l’Université de Montréal, on l’observe depuis 2007. En France, selon Wikipédia, « Le faucon pèlerin sédentaire est surtout présent sur les reliefs montagneux des Vosges, Alpes, Pyrénées, Jura et Massif central. Il a aussi progressé sur les falaises littorales de la Bretagne et reconquis celles de la Normandie, de la Picardie et du Pas-de-Calais. »
Le faucon pèlerin n’est pas grégaire puisqu’il requiert un vaste territoire pour se nourrir et subvenir aux besoins de sa progéniture. Chaque couple est facilement distant de quelques kilomètres.
Il a peu de prédateurs sinon quelques oiseaux de proie. Son espérance de vie dans la nature tourne autour de treize ans. S’il leur convient, ils nichent au même endroit d’année en année. Ils n’aiment pas s’installer dans des lieux à découvert et près du sol, c’est pourquoi ils choisissent généralement des falaises avec un surplomb, sous les ponts ou plus rarement comme ici au sommet d’un gratte-ciel. Noter toutefois à l’Université de Montréal l’installation d’un abri artificiel constitué d’une boite de bois ouverte sur le côté, munie d’un fond rocheux pour imiter un sol naturel et choisi aux couleurs de la femelle pour mieux la camoufler.
Grâce à la caméra web installée à proximité, tout le monde peut suivre en direct l’évolution de la couvaison, les éclosions ainsi que les comportements des poussins et de leur mère jusqu’à leur départ. Espérons que tout se passera bien pour cette belle famille, mais la vie animale reste bien plus cruelle que la nôtre. Il ne faudra pas s’étonner de la disparité entre les oisillons et la préférence de la mère à mieux nourrir les plus vigoureux au détriment des autres puisque quatre œufs s’avèrent une nichée passablement importante pour ce type d’oiseau.
Profitez de ces moments uniques pour partager quotidiennement une quinzaine de minutes d’observation et de discussion avec les enfants. Voir la vie animale en action et en direct, la regarder évoluer jour après jour restera à jamais gravée dans leur mémoire. Et si des moments difficiles surviennent pour l’un ou l’autre des individus, ils permettront d’expliquer les aléas de la vie, ses injustices inhérentes et leurs conséquences parfois désastreuses.
Peut-être cette leçon de vie aidera-t-elle à arrondir les angles les plus capricieux.