Savoirs anciens, 60

Dans ma série d’articles sur les savoirs anciens, je me permets une brève incursion du côté arithmétique pour parler du nombre 60. Cela peut paraitre étonnant que ce nombre soit si présent dans notre quotidien, et ce depuis des temps immémoriaux.

La valeur 60 a envahi la vie d’homo sapiens dans un passé lointain. Attestée chez les Sumériens voilà plus de 5000 ans, les Babyloniens l’ont ensuite adoptée. On le retrouve plus tard dans les calendriers hindou et chinois. Par la suite, les Grecs, les Indiens, les Arabes, les Égyptiens et les Européens ont tous adopté cette base de calcul pour mesurer le temps et les angles.

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Un cercle est divisé en 360 degrés (6 x 60), chaque degré en 60 minutes et chaque minute en 60 secondes. Une journée est divisée en 24 heures (4 x 6), chaque heure en 60 minutes et chaque minute en 60 secondes.

On voit que la base 60 n’était pas globalement utilisée comme notre base 10 actuelle. 24 (heures) ne divise pas 60, mais cela s’explique. On doit en fait considérer la base 60 comme étant la multiplication de deux bases. D’une part, les facteurs 5 et 12 donnent 60, de même que les valeurs 6 et 10. Ces deux multiplications correspondent à deux moyens de facilement compter jusqu’à 60 à l’aide de nos deux mains.

Oui, nos ancêtres apprenaient à compter sur leurs doigts jusqu’à 60 et pas seulement jusqu’à 10 comme nous ! Comme quoi l’avancement des connaissances se permet parfois de reculer. Certains peuples actuels continuent toujours de compter de la sorte, reliquat d’une culture multimillénaire. La plus utilisée est la technique des phalanges. Excluant le pouce qui sert de marqueur, les 4 autres doigts d’une même main contiennent 3 phalanges chacune pour un total de 12. Le bout du pouce désigne à la suite les 3 phalanges de l’auriculaire, de l’annulaire, du majeur et de l’index pour un compte de 12. La deuxième main lève alors 1 doigt pour désigner qu’on a atteint 1 fois ce compte. En recommençant ce processus jusqu’à ce que les 5 doigts de la seconde main soient tous levés, on a atteint le compte de 60. On a donc 60 en ayant multiplié 5 fois le nombre 12.

Toujours pour compter 60 à l’aide de deux mains, il existe une deuxième technique qui multiplie 10 fois le chiffre 6. La main droite compte en levant 1 doigt à la fois. Une fois les 5 doigts levés, on lève 1 doigt de la main gauche pour un total de 6 levés de doigts. Lorsque la main gauche est pleine, on a atteint le compte de 30. En inversant le rôle des deux mains et en recommençant le processus précédent, on parvient à obtenir la valeur 60.

Diviser la demi-journée en 12 heures, celles pouvant s’afficher sur un cadran solaire, ne constituait donc pas un choix aléatoire. Les anciens ont donc obtenu une journée complète totalisant 24 heures. Une fois l’heure définie, ils l’ont subdivisé en 60 minutes et chaque minute en 60 secondes.

Les 360 degrés d’un cercle peuvent paraitre plus mystérieux. On n’obtient pas des quadrants de 60 degrés mais 90. Diviser un cercle en 6 portions de 60 degrés peut paraitre géométriquement illogique. Et pourtant, une raison précise pourrait se terrer sous cette étrange division. J’en réfère à mon article sur un autre savoir ancien où j’inscris un hexagone dans un cercle. En reliant le centre du cercle à chaque sommet de l’hexagone, on obtient bien 6 angles de 60 degrés. Et pourquoi choisir d’inscrire un hexagone plutôt que toute autre figure géométrique ? Parce que chacun de ses côtés mesure précisément la valeur du rayon du cercle. Ainsi, l’hexagone et le cercle ont une relation intime qui pouvait s’avérer très utile. Ainsi, subdiviser un cercle en 6 portions de 60 degrés parait bien plus sensé qu’à priori. En reprenant pour le degré la subdivision temporelle des 60 minutes et 60 secondes, on obtient la précision des angles désirée.

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Et voilà comment la base sexagésimale a marqué nos mesures, celle du temps qui passe ainsi que celle des subdivisions d’un cercle. Notez qu’un mouvement cyclique comme celui d’un bœuf qui tourne autour d’un axe relie les notions de temps et de géométrie. Il est donc normal de retrouver les minutes et les secondes dans les deux notions.

Dernier point non négligeable, les six premiers chiffres divisent 60 et il en possède six autres pour un total de douze facteurs (1, 2, 3, 4, 5, 6, 10, 12, 15, 20, 30, 60). Il est donc possible de subdiviser 60 en parts égales de douze façons différentes. Dans un monde où on comptait des valeurs entières, têtes de bétail, œufs, baies, lapins, perdrix, etc., compter par groupes de 60 unités pour ensuite les subdiviser également parmi la communauté constituait un atout de taille.

En définitive, la base sexagésimale (60) ne doit rien aux hasards, mais bien à des considérations pratiques compréhensibles pour chacun des habitants des temps anciens. La valeur 60 désignait peut-être aussi un grand nombre au-delà duquel on devenait riche, l’ancêtre de notre million ou notre milliard. L’humain n’avait pas encore transformé ses avoirs en papier-monnaie qu’il pourrait accumuler sans limites. 60 chèvres l’occupaient suffisamment pour qu’il n’espère pas en posséder bien plus, une façon naturelle d’éviter les abus des systèmes économiques. Oui, lorsqu’on doit travailler fort pour conserver son dû, on manque de temps pour en rajouter. Pourrait-on se servir de cette leçon de l’histoire pour revoir le prochain système économique lorsque l’actuel collapsera ? La base 60 reprendra peut-être du service au-delà de la mesure du temps et des angles.

Savoirs anciens — Une base parfaitement carrée

Cet article reprend les notions présentées dans celui d’hier en rapport avec le triangle rectangle de proportions 3-4-5, mais sa lecture n’est pas requise pour comprendre la suite.

Me voici donc à Gizeh sur un haut plateau dominant les constructions environnantes. Mon client, un certain dénommé Khoufou, pharaon de profession, m’a commandé la construction d’un énorme bâtiment de forme pyramidale devant présenter des dimensions parfaites. Sa base doit donc posséder quatre côtés rigoureusement identiques, mais également quatre angles identiques qu’on appelle «droits». De fait, 4 côtés identiques ne suffisent pas à définir un carré, un losange étant le contre-exemple.

J’utilise évidemment la coudée royale comme étalon de mesure pour cette pyramide qui fera 440 coudées de chaque côté. Il ne faut pas se le cacher, ce bâtiment surpassera tout ce qui s’est déjà construit, du moins en hauteur. Mais avant de penser à entasser des pierres, imaginons un moyen de tracer sa base, un carré parfait. Je rencontre Pharaon pour discuter de cette première tâche qui s’avère cruciale pour tout le reste à suivre, évidemment.

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— LeCorbot, donnez-moi la liste du matériel et le nombre de travailleurs dont vous aurez besoin pour parachever cette première tâche. Je veux également savoir quand vous aurez terminé de tracer ce carré selon les sévères exigences qui vous ont été transmises.

Je lui tends un bout de papier qui le fait largement sourciller.

— LeCorbot, vous me prenez pour un pharaon, pour un idiot ou pour un désœuvré?

— Grand Khoufou, je vous jure que cette liste représente tout ce dont j’ai besoin.

— Une longue cordelette que vous mesurerez vous-même, six petits piquets de bois, quelques bouts de ficelle, un maillet et une coudée royale étalon. Avec ceci, vous prétendez pouvoir tracer la base parfaite de mon pharaonique bâtiment dont je n’ai pas encore défini son usage final!

— C’est exact, votre Grandeur et future bienveillante asséchée Momie.

— Je ne vous donnerai pas jusqu’à la prochaine crue pour terminer ce premier travail!

— Ce ne sera pas nécessaire. Laissez-moi jusqu’au zénith, ce sera amplement suffisant, oh Grand Escogriffe!

— Jamais entendu ce compliment avant aujourd’hui. Grand Escogriffe, ça me donne un air royal et léonin, j’aime bien. Vous me plaisez, cher noir volatile! Combien de travailleurs désirez-vous?

— Aucun, sérénissime et majestueux Barbichu! Je préfère travailler seul.

— Vous êtes certainement fou, mais puisque je ne perdrai que quelques heures, soit. Cependant, si vous me décevez, vous dormirez ce soir dans la fosse aux lions.

— Je n’oserais jamais faire planter les royales dentitions félines dans mes impropres chairs. Cet honneur représenterait une bien trop fabuleuse récompense pour un simple architecte. Trouvez autre chose à donner à vos lions. N’ayez de doute, j’utilise une technique très économique, mais des plus performantes.

— Je ne crois personne et encore moins un rusé Corbot! J’irai inspecter votre travail juste après le zénith. Mes lions m’accompagneront, question de leur faire flairer leur prochain repas.

— Je garde toute ma confiance en mes moyens, votre Macronissime Altesse. Aux environs de midi, je prendrai une bouchée en vous attendant. Y a-t-il un Subway dans les parages?

— Un quoi?

— Bah! Laissez tomber. Trouver un sous-marin dans un désert, c’est pas de la tarte! Je me contenterai de la bouffe locale, tiens, pourquoi pas une tarte? Pourvu qu’il y ait de la bière fraiche! Il fait une de ces chaleurs!

— Bien entendu nous avons de la bière! Nous sommes un peuple civilisé même si nous vivons dans un carré de sable! Nous ne sommes pas de buveurs de jus de chaussettes fabriqués avec de vulgaires raisins!

*****

La technique

La description suivante prouvera que tracer la base de la pyramide de Khéops est pour moi un jeu d’enfant comme le laisse entendre la petite liste de matériel remise au promoteur. Tout ce dont j’ai besoin, en plus de ce matériel plus que rudimentaire, est de connaitre le fameux théorème de Pythagore et surtout son célèbre triangle de dimensions 3-4-5 avec lequel je créerai une équerre géante d’excellente qualité qui me servira à déterminer les quatre coins (O, A, B, C) du futur bâtiment. Pourquoi ce triangle en particulier? Il possède la fabuleuse propriété de n’avoir que des nombres entiers presque semblables qui me permettront de diviser facilement et très précisément la longueur totale de la corde.

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Étape préparatoire

Je dois tracer la base de la pyramide de Khéops, un carré parfait de 440 coudées de côté selon le décret du Pharaon. Ce nombre n’est pas anodin comme nous le verrons maintenant. Je prends une très longue cordelette. Je mesure une longueur du triple de la dimension décrétée, soit 1320 coudées. Je la plie en 3 et je noue un bout de ficelle aux deux coudes de la corde qui donnent, sans devoir les mesurer, les distances 440 coudées correspondant au repère 1, et 880 coudées pour désigner le repère 3, les deux mesures étant prises à partir de la même extrémité de la corde. Je plie ensuite la même corde en 4 pour trouver la longueur 330 coudées à partie de sa seconde extrémité jusqu’au premier coude de la corde pliée. Je lui fais correspondre le repère 2 que j’indique avec un autre bout de ficelle noué à cet endroit précis.

Remarque: La mesure initiale de la corde à 1320 coudées a été produite avec la coudée royale étalon fournie par Khoufou. Ce travail multiplie l’erreur et la valeur précise de 440 coudées s’en trouve ainsi affectée. Il existe un moyen de donner à la corde une plus grande précision par une technique que je présentai dans un autre article et qui comporte en plus une surprise de taille.

Étape bleue

Je dispose la corde au sol, je relie ensemble ses 2 extrémités, je plante un premier piquet à cet endroit et sa position détermine le coin O de la pyramide. Je tire la corde en direction nord correspondant à l’alignement d’un premier côté de la pyramide, et ce jusqu’au repère 1 situé à 440 coudées sur la corde. Je plante un piquet juste à cet endroit, voilà donc le coin A, le deuxième de la pyramide.

Remarque: Si vous désirez savoir comment je suis parvenu à trouver le nord exact avec des moyens primitifs, je vous en ferai part dans un autre article.

Pour trouver les deux autres coins, les choses deviennent un peu plus subtiles. Je tire ensuite la corde pour la tendre en direction est, celle correspondant au deuxième côté, vers le coin B. Inutile de chercher à calculer un angle droit, celui-ci se créera de lui-même. Lorsque j’atteins le repère 3 sur la corde, je plante un piquet à cet endroit en m’assurant que la corde soit parfaitement bien tendue, c’est le point M. Cependant, ce piquet n’indique pas un coin de la pyramide, mais seulement une direction avec le coin O situé aux trois quarts de la position du troisième coin. Par contre, je viens de tracer un angle droit parfait avec le côté 1 de la pyramide valant exactement 440 coudées tel que requis. J’ai déjà déterminé deux coins sur quatre, un côté sur quatre et un angle droit sur quatre. Le travail progresse rapidement et midi est encore loin. Les lions auront droit à du mouton ce soir.

Étape rouge

J’intervertis simplement les deux segments de corde en conservant le même alignement pour les deux côtés à 90 degrés. Je plante un piquet vers le Nord, cette fois, exactement au repère 2 de 330 coudées, c’est le point N. J’aligne le repère 1 valant 440 coudées en direction de la ligne formée du coin O et du point M. Je tends bien la corde. Le repère 1 sur celle-ci indique que je viens de trouver le coin B de la pyramide, le troisième. J’y plante un autre piquet et le côté 2 du futur bâtiment est maintenant tracé. Bilan provisoire: 3 coins sur 4, 2 côtés sur 4 et 1 angle de 90° sur 4.

Étape verte

Je déplace le repère zéro de la corde pour le mettre au coin A. Je place le repère 2 de la corde situé à 880 coudées au piquet placé au coin B. Je tire bien la corde en direction du coin C dont j’ignore encore sa position exacte, mais ce n’est pas grave, la corde tendue et le repère 1 me le révèleront. Je plante un piquet précisément à ce repère. Voilà la quatrième extrémité de la pyramide, le coin C, ainsi que le traçage des côtés 3 et 4 de la base de ce futur fabuleux monument. Les trois autres angles droits ont également été directement obtenus en plantant ce dernier piquet. Je rallonge ensuite la corde jusqu’à une valeur de 1760 coudées, je trace ensuite le périmètre complet du carré parfait en joignant les 4 piquets O, A, B et C. Le travail est terminé.

Notez que je n’ai jamais eu besoin de recourir à la diagonale du carré pour créer ce dernier. Heureusement, car sa longueur précise est un nombre irrationnel et il est bien difficile dans ces temps anciens de la déterminer à partir de la longueur d’un des côtés et d’une corde pliée. Cependant, en bon architecte, je m’octroie une dernière étape, celle de la preuve de l’exactitude de mon carré que j’utiliserai pour démontrer la qualité de mon travail au Pharaon.

Étape orange

Tout d’abord, je m’assure de la même longueur des 4 côtés de la pyramide en utilisant l’origine de la corde et le même repère 1 pour chaque côté. Une fois ce test réussi, je peux maintenant procéder à l’équerrage des 4 angles grâce aux diagonales du carré.

Je me fous d’ignorer la longueur des deux diagonales, car je peux facilement tester leur similitude en comparant simplement leur longueur. Si les deux diagonales diffèrent le moindrement, les 4 angles ne sont pas tous à 90°, nul besoin de mesurer ces angles pour le prouver.

En obtenant des diagonales rigoureusement identiques, je prouve l’exactitude de la forme carrée du périmètre sans jamais utiliser la valeur de leur longueur qui peut rester totalement inconnue. En bonus, je trouve le centre exact de la pyramide, le point X situé à l’intersection des deux lignes.

Épilogue

En l’espace de quelques instants et sans aucun calcul, à l’aide d’une simple corde et de quelques piquets, je viens de tracer la base parfaitement carrée de la plus formidable pyramide de tous les temps. De plus, point très important, peu importe la longueur exacte de la corde utilisée au départ, cette technique assure le traçage d’un carré aux côtés rigoureusement identiques et aux angles exactement de 90° sans recourir à aucun extraterrestre… du moins, pour cette première étape.

Par contre, je viens de déboulonner le mythe attribuant à Pythagore le principe du triangle rectangle 3-4-5. Il est certainement possible que les Anciens utilisaient ces proportions sans avoir prouvé son exactitude comme l’a fait Pythagore bien plus tard. Ils avaient probablement constaté les rapports proportionnels entiers 3-4-5 de manière empirique et cela suffisait amplement pour garantir la qualité de leurs constructions.

La pyramide de Khéops mesure effectivement 440 coudées royales de côté. Ce chiffre permet d’obtenir des longueurs du triangle 3-4-5 de 330, 440 et 550 coudées en les multipliant par 110, faisant en sorte qu’aucune mesure de fractions de coudées n’est requise nulle part. Hasard? J’en doute.

La technique présentée dans cet article est bien plus précise que celle constamment utilisée par des poseurs de pavés qui tirent deux ficelles et ajustent l’angle droit avec une toute petite équerre placée à l’intersection des cordes. Leur imprécision rendrait hilare n’importe quelle momie pharaonique m’ayant vu à l’œuvre.

Pharaon fut satisfait du travail accompli grâce aux preuves que je lui ai apportées. Il a donné son assentiment royal puisqu’il avait parfaitement compris ma méthode en regard de sa très grande simplicité. Elle s’avérait si évidente que Khoufou n’a même pas pris la peine de la noter. D’après lui, «n’importe quel enfant de cinq ans saurait la reproduire». 4500 ans plus tard, il semblerait que nous ayons une pénurie d’enfants de cinq ans puisque nous nous extasions sur ce puéril exploit en lui attribuant des origines des plus mystérieuses.

Croissances et exigences

Il est faux de croire que les Puissants de ce monde peuvent tout obtenir grâce à leur colossale fortune. Ils ne peuvent se payer deux éléments essentiels qui leur permettent de maintenir leur mode opératoire.

Le premier élément, les oligarques ont besoin d’une population mondiale croissante, sinon le système économique mondial capitaliste meurt étouffé puisqu’il est essentiellement basé sur le principe de la croissance ininterrompue des profits. Après avoir économisé en ayant coupé tous les gras possibles, après avoir acheté ou s’être autrement débarrassé de la plupart de leurs compétiteurs pour récupérer leur clientèle, le seul autre moyen d’augmenter les profits passe par la croissance des ventes. Ils doivent donc vendre plus d’unités à chaque consommateur tout en additionnant de nouveaux consommateurs.

Le graphique suivant montre l’irréversibilité du processus et la diminution généralisée. Notez que l’élite subsiste plus longtemps à l’effondrement et celle-ci compte bien en profiter pour changer de paradygme une fois que les autres bulles se seront effondrées. C’est pourquoi, pour l’instant, elle s’en fout encore de la croissance idiote puisqu’elle s’en nourrit et elle sera la dernière à y survivre. Cependant, leur mutisme pour le cacher ou leurs efforts pour tenter de nous convaincre du contraire ne saurait inverser ce processus.

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Même les adolescents comprennent qu’une croissance continue infinie est impossible, sinon qu’adviendrait-il de leurs boutons d’acné et de leur moral ? Pourtant, le système capitaliste global nie catégoriquement cette évidence puisque toute sa stratégie repose sur une croissance continue ininterrompue. Vous avez entendu parler des dérives liées aux techniques de Ponzi. Pourtant, le système capitaliste mondial est construit sur ce principe de pyramide qui doit accroitre continuellement les dimensions de sa base. Autrement, tout le système flanche, implose et disparait.

Le deuxième élément essentiel dont les dirigeants de l’ombre ne peuvent se passer, ce sont nos bras pour faire leurs besognes. Afin de conserver leur hégémonie, ils doivent écraser les compétiteurs actuels et potentiels, détourner des ressources de tous types, affaiblir les pays inamicaux à leurs désirs. Pour ce faire, ça prend des guerres et des populations qui les soutiennent en désirs et en actes.

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Des guerres sont alors inventées en utilisant toutes sortes d’excuses et de magouilles pour soutenir la croissance des consommateurs et des profits. Les économies des autres pays sont détruites et remplacées pour les contrôler afin de s’approprier toutes les ressources. Bon, on connait la suite.

Voilà pourquoi la population mondiale croît sans cesse et elle le fera jusqu’à l’effondrement de sa bulle, associée à celle qu’elle nourrit, le capitalisme d’entreprise et d’état, car il ne faut pas se bercer d’illusions, toutes les bulles finissent inexorablement par péter. Ce sont les mathématiques qui le disent. Ensuite, libre à nous tous d’y croire.

Nous sommes utilisés, non seulement comme consommateurs, mais également comme souteneurs des régimes politiques et financiers basés sur des croissances absolues.

Cet article ne cherche pas à critiquer ou à soutenir un système économique plus qu’un autre. Je ne désire pas non plus vous convertir à une idéologie quelconque. Je mets sur la table une équation dotée d’un point d’inflexion, au mieux une asymptote. En termes moins mathématiques, la population de la Terre finira par décliner. Dans le meilleur des cas, elle cessera de croitre. Cependant, cette deuxième possibilité ne peut pas s’obtenir avec un régime économique mondial basé sur la croissance perpétuelle.

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Vous pouvez encore dormir sur vos deux oreilles, l’hécatombe ne surviendra probablement pas de notre vivant, mais tous les signes avant-coureurs ont commencé à apparaitre et certains même depuis longtemps. Remarquez les dérives financières de plus en plus répétées causées par la recherche « créative » de nouveaux profits. Voyez comment la majorité des marchés sont de plus en plus monopolistiques. Observez les méthodes et les arguments de plus en plus tordus et mensongers pour créer des guerres. Constatez l’essoufflement de la terre nourricière par les monocultures afin de maximiser les profits. Notez la destruction irréfrénée des habitats non agricoles pour les convertir en terres arables. Un consommateur mort de faim est un consommateur en moins donc une source de profit disparue.

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Bientôt, la terre ne pourra plus nourrir que les humains, mais sans le reste du biotope, notre bulle explosera. C’est absolument impossible d’arriver à un autre résultat si la population humaine croit constamment.

Photos : diversifiedtrust.com ; delibere.frafriqueinside.compszczolyimy.pl

Malheureux de naitre avec dix doigts

Si j’écris 10, et que je vous dis que ce n’est pas un dix, vous me prendriez pour un illuminé. À l’instar de la pipe de Magritte dans son célèbre tableau « La trahison des images » qui n’est pas une pipe, mais la représentation d’une pipe, 10 n’est pas un dix, mais une représentation de plusieurs nombres possibles dont l’une est un dix.

J’étais en sixième année du primaire lorsqu’on m’a enseigné pour la première fois le principe mathématique des bases. Nous partions de la prémisse que nous rencontrions des extraterrestres à huit doigts et qu’ainsi, eux ne comptaient pas dix symboles différents pour écrire les nombres, mais seulement huit en incluant le zéro. Donc, au-delà de sept, il fallait comprendre que nous devions travailler à deux chiffres, comme lorsqu’on arrive au-delà de neuf dans le système décimal. En écrivant 10 (lire un, zéro), ça ne valait plus dix, mais bien huit. Et on poursuivait sur cette lancée, 11 (lire un, un) valait neuf, 12 (lire un, deux) valait dix, etc. En changeant de la base 10 à la base 8, on réapprenait comment on écrit symboliquement les nombres. J’étais loin de me douter que je retrouverais cette base 8 bien plus tard en informatique et que 10 (lire un, zéro) serait effectivement la représentation octonumérique du nombre huit.

L’humain est né désavantagé. Il a été conçu avec dix doigts plutôt que huit. Ainsi, la base décimale (base 10) est devenue sa principale façon de compter. Nous utilisons dix chiffres différents, dix symboles distincts en commençant par le 0 jusqu’au 9. Pour compter au-delà de neuf, on doit utiliser deux symboles dont la position de chacun par rapport à l’autre définit une valeur différente. On sait tous que l’écriture décimale du nombre dix s’écrit 10. Le 1 ne vaut plus un, mais dix, et le 0 signifie qu’on additionne zéro à dix. Et une fois ce concept compris et maitrisé, nous sommes en mesure d’écrire n’importe quelle valeur numérique à partir de seulement dix symboles différents.

Si l’humain était né avec huit doigts, il aurait été avantagé au moment de traiter l’information sous forme binaire, car huit est une puissance du chiffre deux, deux étant la quantité maximale de symboles différents utilisés dans un compte binaire que traite un ordinateur conventionnel, soit le zéro et le un.

Si nous avions eu seulement huit doigts, symboliquement, 10 vaudrait huit plutôt que dix. Ainsi, le système octal à huit symboles ou le système hexadécimal à seize symboles utilisés en électronique de l’information nous auraient posé moins de problèmes de compréhension puisque huit et seize sont tous deux des puissances de deux. 2 x 2 x 2 = huit et 2 x 2 x 2 x 2 = seize, mais dix n’est pas une puissance de deux.

Ainsi 10 (un un suivi d’un zéro) vaut deux en binaire (base deux), vaut huit en octal (base huit), vaut seize en hexadécimal (base seize) et il vaut dix lorsque les créatures naissent malheureusement avec dix doigts.