V comme dans vie

Dans ma série d’articles consacrée à un mot commençant par une lettre précise, voici le temps venu du V et d’un tout petit mot à l’utiliser en entame, le mot vie.

V, la vingt-deuxième lettre de notre alphabet possédait autrefois chez les Romains une étrange caractéristique, son symbole servait tout aussi bien à définir le V que le U. On le remarque sur certains frontons d’édifices où une expression latine a été gravée. Et comme si ce double emploi ne suffisait pas, il servait aussi à désigner le chiffre 5. Alors quand je dis que l’humain aime se compliquer l’existence, n’en doutez plus. Il a par ailleurs été doublé pour former la lettre double vé (W) qu’on appelle « double u » en anglais, relent de la période latine en manque cruel d’imagination pour créer de nouveaux symboles graphiques. Et comble de la confusion, le V grec se nomme « upsilon », en minuscule son symbole est un intermédiaire entre le u et le v (υ) et en majuscule il se dessine comme un i grec (Υ). Et après on s’étonne de la difficulté des élèves à l’école !

V est une consonne fricative, c’est-à-dire qu’elle est générée par la friction de l’air sans occlusion complète. On la désigne en alphabet international par le mot « Victor » et tout le monde sait faire le signe de la victoire en levant le majeur et l’index d’une main afin de produire un joli V.

Je n’aurais pas pu choisir un mot plus important que « vie » pour faire honneur à la lettre V. Dans mon Robert, sa première définition est la suivante : « Fait de vivre, propriété essentielle des êtres organisés qui évoluent de la naissance à la mort en remplissant des fonctions qui leur sont communes ». Je vous l’accorde, c’est loin de constituer une description poétique de la vie !

On parle toujours de la vie avec émotions, car elle s’oppose à la mort, à la fin. La vie, c’est le mouvement, le changement, l’évolution. Parce que la vie est fragile, elle est précieuse. Et parce qu’elle se bat, elle nous donne du courage.

La vie reste le plus grand mystère de tous les temps. Savoir comment nait la vie de la matière inerte représente toujours l’énigme fondamentale que nous propose notre Univers. La Terre a connu la vie bien plus tôt dans sa jeunesse que nous l’imaginions. Des stromatolites de 3,5 milliards d’années ont été identifiés en Australie. Ce sont des roches issues d’un métabolisme biologique.

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Même la frontière entre l’inerte et le vivant reste floue. Nous peinons à classer les virus dans l’une ou l’autre de ces catégories. Ces intermédiaires représentent donc la clé du passage du non-vivant au vivant. Ainsi, à votre prochain épisode de grippe qui ne devrait plus tarder (on ne refait pas un Corbot) remerciez ces microscopiques quasi-bestioles de vous avoir engendré. Ça ne cassera pas votre grippe plus rapidement, mais elle vous semblera peut-être moins antipathique une fois observée sous cet angle.

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On ne peut dissocier la beauté de la vie. Elles sont si liées qu’elles pourraient quasiment être considérées comme des synonymes. Si donner la vie représente une caractéristique commune propre à tout être vivant, en revanche, donner sa vie, l’ultime sacrifice, reste un acte rarissime d’une noblesse qui frôle un palier supérieur à celui de la vie elle-même.

Contrairement aux objets inertes, la vie est l’élément le moins rare et pourtant le plus précieux. Chaque vie est inestimable et mérite tous nos efforts pour la préserver, la nôtre, mais tout autant celle des autres espèces animales, végétales et microbiennes. La vie n’a pas de prix et la sixième grande extinction amorcée par l’humain lui coûtera très cher. Elle risque même de mettre sa propre vie en péril. Lorsque la vie se meurt, l’Univers perd des milliards d’années de travail.

L’humain se comporte avec les autres êtres vivants comme s’ils n’étaient que des objets inertes. Cette attitude de supériorité, de despotisme finira en prise de conscience planétaire, sinon homo sapiens disparaitra. Il rejoindra les milliards d’autres formes de vie ayant déjà vécu et disparu avant lui. La vie pourra alors reprendre le cours de son évolution normale, car…

… c’est la vie !

Chasseuse de géants

Chasseuse de géants (v.f. de I kill giants) est un film belgo-britannico-américano-chinois réalisé par Anders Walter et paru en anglais en mars 2018. Vous pouvez le trouver sur Netflix sous sa dénomination originale anglaise et trame sonore en français.

D’une intelligence et d’une sensibilité rares, ce film s’adresse aux adolescents, aux parents et aux éducateurs.

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Il est dénué de tous les défauts que je déteste dans un film dont le sujet se prête à devenir moralisateur. Je ne vous raconterai pas l’histoire. Je vous conseille seulement de tenir bon même si parfois vous pouviez avoir tendance à vouloir le zapper.

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La jeunesse et certains problèmes auxquels elle fait face méritent amplement notre attention. Ce film possède la finesse de suivre le parcours de l’héroïne à deux niveaux qui s’emmêlent sans montrer aucune frontière, aucun saut d’un à l’autre. C’est génialement amené, tout bonnement parce que c’est vibrant de simplicité et de vérité.

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Il a été présenté en primeur au TIFF (Festival international de films de Toronto) le 9 septembre 2017.

Madison Wolfe dans le rôle principal de Barbara et Zoe Saldana (la verte beauté des Gardiens de la galaxie) dans celui de la psychologue Molly offrent des performances brillantes qui se tiennent loin de la caricature, une tendance naturelle pour le sujet et évitée avec grand art.

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Assurez-vous d’être émotionnellement réceptif avant d’entamer son visionnement. Le film ne vous tournera pas les sangs, mais sa beauté vous atteindra si vous la laissez vous toucher.

Comète

L’origine grecque komê du mot comète signifie « chevelure ». C’est plutôt bien imagé. Toutefois, cette représentation féminine de la comète s’est accentuée et on a associé ces apparitions élégantes à de magnifiques princesses.

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Dans beaucoup de cultures, les comètes ont été liées à l’avènement de catastrophes naturelles, à des annonces de guerres sanglantes perdues ou au décès de rois. On vit le malheur dans la venue dans les cieux de comètes et un côté sombre aux jolies princesses. Certains ont persisté à idéaliser les blondes créatures (les pauvres !) et ont plutôt opté pour des sorcières ayant la main mise sur les beautés… fatales, car la mort et la souffrance suivaient toujours leurs apparitions.

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Évidemment, en ces temps obscurs où les prêtres se cherchaient toutes les raisons possibles, bonnes ou mauvaises, pour garder le peuple et surtout les rois en laisse, ils omettaient volontiers de faire remarquer toutes les catastrophes non prédites par ces étoiles qui fument. Quant aux malheurs, ils en trouvaient toujours un à leur associer puisque les malédictions pullulaient à ces époques et la vie des rois se déclinait dans la brièveté. Leur réputation sulfureuse a été validée aussi bien en Orient qu’en Europe qu’aux Amériques précolombiennes. Vers les années 1000, les Chinois les répertoriaient en les classant par catégories.

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En 1696, William Whiston attribua le grand Déluge au passage d’une comète à proximité de la Terre. Avant cela, la mort de Jules César aurait été annoncée par un astre chevelu.

Représenter ces serpents de feu dans la peinture ou dans la gravure se fit abondamment et son symbolisme demeura puissant pendant très longtemps. Aujourd’hui encore, les comètes fascinent certains et en inquiètent bien d’autres.

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Ces corps mi-poussiéreux mi-glacés ont été éjectés d’un réservoir en contenant des milliards appelé nuage d’Oort aux confins de notre système solaire. Des collisions ou des perturbations transforment leur orbite en une grande ellipse venant frôler le Soleil. Une supernova éclatant près de nous pourrait causer des pressions suffisamment importantes pour engendrer des pluies de comètes comme il s’en est produit durant la genèse de la Terre il y a environ 4 milliards d’années. La Lune montre encore aujourd’hui les stigmates d’un bombardement intensif survenu à cette époque lointaine. L’eau de nos océans serait en partie due aux chutes de comètes sur Terre.

Souvent perçues avec deux queues de couleurs et de directions distinctes, elles dépendent de l’éjection de poussières neutres et d’ions. Il en existe une troisième, invisible et plus longue que les précédentes, formée d’hydrogène. Il est parfois possible de voir une anti-queue qui semble se profiler en direction du Soleil plutôt que l’inverse.

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Les comètes gardent toujours une certaine part de mystère. Leur apparition ponctuelle même en plein jour et durant des semaines permet de comprendre pourquoi elles ont été si symbolisées et si craintes.

Organisme nuisible envahissant – genre passibella mamakessa

Le printemps ramène plusieurs espèces nuisibles envahissantes, mais certaines peuvent sévir à longueur d’année. Voici une histoire vécue par plusieurs d’entre vous.

Une satanée espèce remplie de méchancetés innommables portant le titre fallacieux de « belle-mère » pour mieux cacher sa véritable nature hideuse a prêté pour quelque temps son adorable progéniture ingénue à peine sortie de la puberté à un sombre individu de votre espèce possédant tous les vices afin qu’ensemble ils créent des enfants. On pourrait croire à une énorme bêtise de sa part et à un coup de génie du vôtre. Détrompez-vous, la stratégie de la belle-mère n’en est qu’au premier chapitre.

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La naissance des enfants aura tôt fait de calmer le dépravé qui, tel que prévu, s’assagira grandement en ne conservant de son ancienne vie de débauche que ses jeux vidéos. Les enfants nés de l’union contre nature seront rapidement pris en charge par la belle-mère venue offrir une aide providentielle afin que les deux parents puissent forniquer un peu en toute discrétion le dimanche après-midi.

L’intrigante belle-mère multipliera les visites et les sorties avec les mômes afin de mettre en place la suite de son odieuse machination. Elle détournera l’attention et l’amour des innocents bouts de choux qui, évidemment, au contact d’une telle démone, goberont toutes ses paroles préalablement enrobées d’oursons en gelée. Ses vilains propos concerneront toujours leur père et son ancienne vie de débauche. Puisque la vieille ne leur raconte que la stricte, mais surannée réalité, ses paroles sont corroborées par leur mère. Cette progéniture alors sous influence portera un lourd jugement sur leur père et les enfants demanderont bientôt de s’en éloigner au grand désespoir du malheureux inconsolable qui s’était péniblement transformé en bon gars fiable, et ce pour strictement rien.

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La mère des jeunots, ayant besoin plus que jamais de la sienne, en profite alors pour emporter ses rejetons à la grand-maman gnagnagna le plus souvent possible afin de rencontrer ses nouveaux contacts dégotés sur Tinder. La laide-mère est plus qu’heureuse de poursuivre sa besogne, arrivant presque au dénouement de son plan machiavélique.

Les jeunes mettront un certain temps à y parvenir, mais guidés par la main experte de leur grand-mère, ils finiront ensemble par faire éclore la belle-mère qui se terrait au fond de l’ancienne jeune ingénue ayant jadis volé le cœur du fournisseur actuel des pensions alimentaires.

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Toute cette machination bien huilée a été inventée par la belle-mère originelle comme mode de reproduction et de dissémination très efficace, et ça marche mieux encore que les pissenlits ! Les belles-mères prolifèrent plus que jamais, malgré tous les efforts d’éradication dépensés par les mauvais garçons.

C’est pourquoi il faut impérativement alerter les jeunes hommes. Voici les conseils essentiels à leur prodiguer.

Comme compagne, ne choisissez jamais une jolie femme. Plus elle sera laideron, plus la belle-mère vous laissera tranquille.

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Une autre solution acceptable, inscrivez-vous sur Tinder et attendez les invitations de mères de famille sur le point de divorcer. Ça coûte beaucoup moins cher et la belle-mère possède déjà son souffre-douleur qui paye les pensions alimentaires.

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Dans le cas où vous seriez tenté par une beauté fatale, amenez-la vivre au moins à dix-mille kilomètres de sa mère. Croyez-moi, les enfants détestent parler longtemps au téléphone. De plus, interdiction totale d’accepter les frais virés. Ça écourtera drastiquement les conversations ainsi que le nombre de ses tentatives. Pour ceux qui connaissent le moyen de configurer leur router internet, bloquez les ports utilisés par Skype et tous les autres logiciels de communication.

Ne délaissez jamais vos vilaines habitudes de mauvais garçon. De toute façon, votre union ne durera pas plus longtemps. Vous aurez également l’excuse de dire à votre dulcinée qu’elle vous a choisi en connaissance de cause alors que si vous changez, même pour le mieux, vous entendrez inexorablement la phrase : « tu as changé ».

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Ne jetez aucun jeu vidéo, ça finit toujours par servir de nouveau. Cependant, achetez-les en toute discrétion sur le Web. Votre ex ne pourra pas jeter ou s’approprier vos coffrets et vous laissant croire que vous les avez égarés. Surtout, elle ne pourra pas s’en servir pour attirer les gars sur Tinder en plaçant sur le site une photo d’elle avec en arrière-plan tous vos meilleurs titres de jeux.

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Je vous conseillerais bien de vous abstenir de faire des bébés, mais malgré la grande sagesse de ce conseil, tant pour vous que pour la surpopulation mondiale, les mauvais garçons finissent toujours par laisser trainer leur engin un peu partout et surtout là où c’est le plus dangereux, se croyant immunisés contre les MTS et les belles-mères.

Ne pensez jamais que vous parviendrez à neutraliser les manigances de votre belle-mère en l’amadouant. Si vous le pensez sincèrement, dites-vous qu’elle vient de compléter avec succès la phase 1 de son projet qui vous concerne. Cette espèce envahissante a peaufiné sa technique durant des millénaires et utilise la transmission orale de ses connaissances pour ne laisser aucune preuve de ses méfaits. Elle a poussé la collaboration intergénérationnelle à un degré de sophistication ultime qui ne vous laisse aucune chance. Vous êtes un cloporte face à une vipère affamée en train de montrer à sa descendance comment vous chasser… dans les deux sens du terme.

Une erreur fréquente est de croire qu’on court moins de chance de se retrouver avec une belle-mère exécrable si on la choisit jeune. Ne soyez pas sot, vous l’endurerez simplement plus longtemps.

J’entends d’ici vos pensées. Vous aimeriez savoir si j’ai un conseil à vous donner alors que vous venez de comprendre dans quel guêpier vous vous êtes fourré. Je ne veux pas vous bercer d’illusions alors je ne vous dirai rien. Je ne vous souhaite même pas bonne chance. Vous n’en aurez pas. Par contre, vous me faites grandement pitié. Est-ce d’un quelconque réconfort ?

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Je sais que des belles-mères me lisent. Alors à elles, je tiens à dire que malgré mes propos pleins d’humour et de vérité, j’aime beaucoup ma belle-mère.

Quoi, chérie ? Ta mère est morte voilà 15 ans ? Je sais, je sais.

Comme je vous disais, j’aime beaucoup ma belle-mère.

Quoi chérie ? Ce soir je dors dans le salon ?

Qu’est ce que je vous disais à propos de leur prolifération ! Bof !, tant qu’à dormir dans le salon, aussi bien de jouer à un jeu vidéo !

Photos : objectifsante.mutplmoms.com ; versionbeaute.com ; romantique54.skyrock.comideospherique.blogspot.ca ; evuneshama.org ;

 

La langue des Gaulois d’Amérique

Je suis d’origine québécoise, mes ancêtres sont français et amérindiens. Quand j’étais jeune, tous les gens ordinaires parlaient joual. Ce mot provient de la déformation du mot « cheval ». À l’instar du créole, le joual est un mélange de langues. Dans ce cas précis, le joual louvoie entre le français, le vieux français et l’anglais. Rajoutez-y une grammaire bicéphale, une prononciation lâche sur un fort accent breton moyenâgeux et vous obtenez un résultat plutôt incompréhensible pour les gens d’autres origines.

Durant les décennies 1960 et 1970, la révolution tranquille, c’est le nom qu’on a donné à notre affirmation comme peuple distinct libéré des jougs de l’Église catholique et de la domination anglaise, nous a rapprochés de nos origines françaises. Nous avons peu à peu épuré notre langue des mots et des expressions anglaises de mauvais aloi. Ce travail se poursuit encore aujourd’hui, car la culture a de la mémoire. Qui plus est, nous sommes 8 millions d’individus rassemblés sur un territoire entouré d’un océan de 400 millions d’anglophones. L’on constate bien évidemment que l’anglais est fortement prisé, il permet mieux que d’autres langues, dont le français, d’inventer des néologismes. À une époque où la technologie avance à un train d’enfer, le français peine à suivre le rythme de création des mots-valises et des acronymes composés à partir de mots techniques.

Tâche difficile pour un peuple géographiquement isolé de protéger sa langue face à une autre langue dont ses hégémonies tant géographique que technologique la rendent si attractive. Nous avons créé des institutions et avons voté des lois pour soutenir notre langue. Nous encourageons les immigrants à parler français. Nous le mettons en valeur, nous l’embellissons, nous y apportons notre contribution et nous travaillons sans relâche à contrer la puissance d’assimilation de l’anglais. Ainsi, nous nous empressons à créer des néologismes lorsqu’un mot anglais, souvent technique, cherche à s’imposer. Nous forçons l’usage des bons mots français ou des bonnes expressions françaises lorsqu’ils existent. Nous produisons nos propres émissions de radios, de télé, nos propres films, notre propre théâtre. Nous écrivons et éditons des tas de livres, malgré leur faible rentabilité. Nous nous efforçons d’être à l’affût des pièges linguistiques qui finissent par dénaturer une langue. Bien sûr, l’anglais reste incontournable qu’on soit Chinois, Russe, Argentin, Finlandais ou Québécois. Paradoxalement, le pourcentage de Québécois parlant couramment l’anglais est en forte hausse depuis notre révolution tranquille, car nous ne combattons pas le bilinguisme, nous combattons l’absence du français. Nous combattons l’anglicisation des allophones au détriment de leur francisation. Nous exigeons de travailler en français, de nous servir en français dans les boutiques, les restaurants et nos institutions logeant sur notre territoire. Plus qu’ailleurs, l’image de l’irréductible village gaulois convient très bien au peuple québécois faisant face à l’envahisseur anglophone omniprésent. Nos caricaturistes montrent d’ailleurs régulièrement nos dirigeants portant les habits de l’un ou de l’autre des personnages de la fameuse bande dessinée. Dans le prochain article, j’aborderai l’évolution de la langue française et son avenir.

Distinguées

C’est une vérité de La Palice, je le sais, mais je dois ici l’affirmer une fois de plus, la vie est injuste. Que ce soit à cause de notre patrie, de notre famille, de notre état de santé ou de notre apparence physique, on nait avec nos gènes et on vit dans un milieu qui ne nous apporte pas les mêmes chances de succès ou les mêmes années d’existence.

Cependant, de toutes ces injustices, l’une d’elles se démarque des autres et c’est l’apparence physique. Déjà, le mot le proclame, c’est une apparence. Cela ne signifie rien, sauf si on compare les personnes à un modèle bien défini. Si on peut compter l’argent pour connaitre quelle famille est la plus riche. Si on peut dresser un bilan de santé pour découvrir les maladies des gens. Si on peut comparer les régimes politiques et même si on ne peut pas définir précisément les meilleurs, on peut certainement définir les pires en dressant des bilans sur l’âge moyen des décès, le niveau de scolarité moyen, le PIB et autres statistiques plus ou moins révélatrices.

Mais l’apparence physique, la beauté, que du vent ! Nos canons féminins actuels auraient autrefois été relégués au rang de rachitiques souffreteuses juste bonnes à garder le lit. Et ce n’est que l’affaire d’un petit siècle si on pense autrement. Plus loin dans le passé, les vénus étaient replètes, bedonnantes et portaient fièrement le double menton. Et encore plus loin, on les aimait non seulement grasses, mais grosses, car elles avaient plus de chance de terminer leur grossesse et de bien allaiter le dernier et aussi les autres mioches précédents. La beauté est totalement subjective et c’est ce hqui en fait un critère de comparaison déloyal, injuste et sournois.

Petite anecdote. Plus jeune, j’étais en voyage dans une ville européenne réputée pour ses jolies filles et de fait, au bistro-bar de mon hôtel, je regardais les beautés débarquer chaque soir pour l’apéro ou pour la danse. Après seulement le deuxième soir, j’ai commencé à constater un phénomène pour le moins étrange. Toutes les jolies demoiselles que je croisais se résumaient en fait à seulement trois styles, tous plus ou moins semblables. Cheveux longs, lisses, blonds avec ou sans queue de cheval. Jeans et cuissardes, jupe en cuir et talons aiguille ou pantalons beiges et escarpins. Blouse blanche avec plus ou moins de dentelles, petite veste en jeans, ou veste en suède. Bref, il n’y avait que trois modèles pour trois-cents filles. Oui, le premier soir, j’en étais étourdi à force de faire pivoter mon cou, mais ensuite, elles se ressemblaient tellement toutes qu’elles n’avaient plus beaucoup d’attraits.

C’est alors que je me suis mis à repenser aux Montréalaises. Effectivement, la densité des canons de beauté stéréotypés est plus faible au mètre carré, mais en contrepartie, les femmes sont toutes très différentes les unes des autres. C’est là que j’ai compris tout le charme de la métropole. Sur une terrasse en été, en vingt minutes, on peut voir et admirer une foule de belles femmes qui auront fait l’effort de se démarquer, qui auront créé leur propre style et qui porteront fièrement leurs propres couleurs. Pas d’embrigadement ni de mode uniforme. Chacune y va de son style qui, en plus, variera d’une soirée à l’autre. C’est tellement plus agréable et ça permet à chacune de mettre en valeur ses propres attraits. Ainsi, la beauté prend des milliers de facettes dont chacune brille d’un éclat très distinctif. Bien entendu, comme tous les hommes, j’aurai mes préférences, mais gageons qu’elles ne ressembleront pas aux trois-cents clones européennes, car j’ai compris alors que la beauté, ce n’est pas l’affaire de se ressembler, mai au contraire, c’est celle de se distinguer.

Le danger dans tout cela, c’est qu’au lieu de tomber en amour une seule fois, l’homme se retrouve dans la pire des situations possibles, soit celle de tomber amoureux des milliers de fois. Alors, mesdames, pour la Saint-Valentin, ne nous jugez pas trop sévèrement puisqu’il est très difficile pour nous de résister à vos innombrables et si distinctives beautés.

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